« L’UE a pour valeur la démocratie, mais a grand mal à la faire fonctionner à l’échelle continentale »

Cet entretien est paru originellement dans le média en ligne Résilience Commune.

Quel est l’impact de la crise sanitaire sur l’UE? Assistons-nous à une technocratisation, une bureaucratisation, ou à une décentralisation – au vu des réponses nationales éparses de chaque État ?

L’Union européenne, par nature, fonctionne de manière technocratique. Ce n’est pas un pouvoir politique : les dirigeants européens ont une autorité très faible sur ce que font les différents pays, de sorte qu’ils ne parviennent pas à imposer aux pays membres des choix particuliers. Cette impuissance est visible dans les cas de la Pologne et de la Hongrie. L’UE, c’est une administration, un ensemble de règles qui s’imposent via le droit national. Comme nous sommes dans des États de droit, il est impossible pour un gouvernement de transgresser ces règles, surtout lorsqu’elles sont de fait constitutionnalisées dans le cadre de ce que les juristes appellent la « constitution matérielle » de l’Europe.

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Doit-on avoir peur de la dette publique ?

Pour l’Anjou Laïque n°136, Juillet 2021

La crise sanitaire, l’effondrement des rentrées fiscales et les mesures de soutien engagées pour sauver les entreprises ont coûté très cher. La dette publique française a ainsi augmenté d’environ 270 milliards d’euros en 2020. Une somme à laquelle il faudra ajouter le déficit de l’année 2021 qui sera sans doute très élevé. Ce surcroît de dette publique ne risque-t-il pas de menacer les comptes publics et d’empêcher notre pays de prendre les mesures d’investissement nécessaires pour financer son avenir et ses services publics ? Continuer la lecture

1989-2003 : La crise argentine : « que se vayan todos ! » 7/8

Septième épisode de la série Le glorieux passé de l’austérité
Vers l’épisode 1

En juin 2001 une note de l’OCDE, pleine d’optimisme, assurait que l’économie argentine était en train de « renaître de ses cendres » et qu’elle renouerait bientôt avec « sa destinée prometteuse du début du siècle ». C’était bien le moins. Depuis le début des années 90, la politique économique de ce pays avait scrupuleusement respecté les principes du « Consensus de Washington » prônés par cette même OCDE. Mais si les économistes de l’OCDE et du FMI étaient pleinement satisfaits de la situation de l’Argentine, il n’en allait pas de même pour l’immense majorité de la population qui subissait très durement une crise d’austérité qui n’en finissait pas de se prolonger et qui allait aboutir, quelques années plus tard, à une catastrophique crise sociale et économique. Continuer la lecture

Chypre : La crise qui change tout

« Ultimatum », « blocus »… On peine à croire que de telles expressions aient pu être utilisées pour commenter l’actualité européenne. C’était la guerre. La guerre économique. Au petit matin du 16 mars, après une nuit de négociations, les autorités européennes avaient convaincu le président chypriote d’imposer une série de mesures de rigueur et une taxation des comptes bancaires pour éviter la faillite du système bancaire de l’île. La population était sensée se soumettre, le Parlement devait entériner. Ainsi va la démocratie en Europe ; la Troïka devient l’instance proconsulaire de tout pays qui demande l’aide européenne. Ainsi va la solidarité en Europe ; on fait payer aux peuples les mesures qui sont sensées éviter la faillite généralisée du système bancaire européen. Continuer la lecture