Coralie Delaume, souverainiste du peuple

Cet article est une version légèrement modifiée et complétée d’une tribune publiée le 20 septembre 2021 par le Figarofox.

Le livre posthume de Coralie Delaume, Nécessaire souveraineté, vient de sortir chez Michalon, son éditeur. Son décès prématuré à l’âge de 44 ans, le 15 décembre 2020, a marqué la brutale conclusion d’une pensée qui n’a jamais cessé d’évoluer, de se remettre en question, de s’affiner et de s’affirmer.

Jusqu’au bout, elle travailla. Ce petit ouvrage, achevé au début de l’été 2020 et qui se retrouve aujourd’hui dans les librairies, n’est qu’un élément d’une réflexion bien plus vaste qu’elle avait engagée sur la Nation et sur l’État. Le sujet à vrai dire est immense, partiellement délaissé par les intellectuels de plateaux télévisés qui préfèrent souvent verser dans le combat identitaire ou scander de grandes phrases sur les libertés plutôt que de s’intéresser aux prérequis de la démocratie, à ce qui la fait vivre et à ses conséquences.

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« Cela coûte très cher de ne pas augmenter les fonctionnaires! »

Interview pour Marianne à Hadrien Mathoux dans le cadre de la préparation d’une enquête sur les rémunérations du secteur public

Nos chiffres montrent que les revenus de toute une série de fonctionnaires (profs, magistrats, cadres, ingénieurs) s’effondrent depuis les années 1980. Y a-t-il une paupérisation de la fonction publique ?

Le mot « paupérisation » me semble excessif si l’on parle de la fonction publique en général. Le salaire moyen y est proche de celui du privé (2276 euros net par mois contre 2238 euros en 2017). Il faut cependant tenir compte du fait que les personnes qui travaillent pour le secteur public sont en moyenne plus qualifiées que celles du privé. Le problème est moins un risque de paupérisation qu’un sentiment d’injustice que ressentent les fonctionnaires lorsqu’ils constatent qu’à compétence et niveau de responsabilité équivalents ils sont moins bien moins payés qu’un salarié du privé. Continuer la lecture

Un fonctionnaire n’est pas un salarié !

Un fonctionnaire n’est pas un salarié.  Comme son nom l’indique, le fonctionnaire se doit de remplir une fonction. Il ne touche pas un salaire, mais un traitement. Les fonctionnaires assurent votre sécurité dans la rue, organisent le système judiciaire, enseignent à vos enfants, garantissent la neutralité des services publics dans la santé ou la culture. Ce sont eux qui collectent l’impôt et qui supervisent et contrôlent la qualité des aliments que vous achetez en grandes surfaces. Ils veillent à la bonne application de la loi. Ils sont chargés de superviser l’écriture des décrets, de contrôler les budgets publics. Ils sont militaires, chercheurs, magistrats, policiers, médecins urgentistes, inspecteurs du travail, enseignants. Continuer la lecture

Services publics : ce patrimoine bradé de la gauche

La défense des services publics aurait pu être à la gauche ce que la thématique sécuritaire est à la droite : une valeur sûre. Quoi de plus naturel pour un socialiste que de défendre un bien public socialisé au service de la collectivité et donc en tout premier lieu des plus faibles ? Même d’un point de vue strictement électoral, l’opération paraît gagnante : les agents des services publics, des fonctionnaires de l’éducation nationale aux intérimaires de La poste en passant par les chercheurs du CNRS, ont toujours constitué une excellente réserve de voix pour la gauche. Continuer la lecture

L’avenir selon Attali

En 316 décisions, le rapport Attali ne s’est pas contenté de proposer quelques mesures économiques, mais a cherché à mettre en musique l’idéologie sarkozienne : travailler plus, libéraliser, communautariser. C’est le programme des réformes à venir.

« Ceci n’est pas un rapport, ni une étude, mais un mode d’emploi pour des réformes urgentes et fondatrices ». C’est par ces mots que commence le Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française. Et comme tout mode d’emploi, il ne se contente pas de simples « propositions » laissées à l’arbitrage du débat public, mais il dicte et « décide ». Toute loi doit être « efficace », et seuls des experts comme Attali sont à même d’en juger. On se souvient de la proposition iconoclaste de Ségolène Royal qui voulait instaurer des « jury citoyens » pour évaluer l’action de leurs représentants. Le rapport Attali prend acte de l’incompétence des citoyens et des élus pour prendre les « bonnes » décisions et propose donc de « faire évaluer ex ante et ex post tout projet de loi et de règlement » par des comités d’experts (décision 231). De même, chaque service public, chaque agent, chaque dépense, devront être évalués par un système d’organismes indépendants, en concurrence les uns avec les autres (décision 228 à 230). Continuer la lecture