La politique monétaire au défi des faillites bancaires

La faillite de la SVB et les difficultés du Crédit Suiss ont fait naitre la crainte d’une nouvelle crise bancaire et financière. En réalité, les risques de contagion et d’un effondrement du système bancaire sont faibles. Néanmoins, cette crise démontre les difficultés auxquelles sont confrontées les banques centrales dans leur stratégie de hausse des taux d’intérêt.

Entrée de la Silicon Valley Bank qui a fait faillite le 10 mars 2023

Est-on à l’aube d’une nouvelle crise financière ? L’annonce, le 10 mars dernier, de la faillite de la Silicon Valley Bank (SVB), 16ème banque des États-Unis, a eu des répercussions mondiales. C’est la plus importante faillite bancaire dans ce pays depuis la crise financière de 2008. Événement isolé ? Pas tant que ça puisque, quelques jours auparavant, c’était la société Silvergate, spécialisée dans la gestion des cryptoactifs, qui avait déposé le bilan ; puis le 11 mars, soit le lendemain de la faillite de la SVB, on apprenait que les autorités fermaient une troisième banque, qui avait elle aussi beaucoup investi dans les cryptoactifs, Signature Bank. Lundi, les cours boursiers des grandes banques françaises dévissaient sur les marchés boursiers à tel point que Bruno Le Maire se sentit obligé d’affirmer, sur France Info, que « notre système bancaire est solide », et qu’il ne voyait pas de risque de contagion. Mais voici que le surlendemain, le 15 mars, on apprenait que le Crédit suisse connaissait à son tour des difficultés après le refus des Saoudiens de participer à une hausse de capital. Nouvel effondrement boursier des valeurs bancaires. Tout le monde sait que lorsqu’un ministre de l’Économie se donne la peine de rassurer les Français, c’est qu’il y a de quoi s’inquiéter. Aussi a-t-on vu immédiatement fleurir des vidéos et des propos alarmistes sur les réseaux sociaux comme quoi la prochaine crise financière aurait déjà commencé.

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Un vote de sécession ?

Le résultat du premier tour de l’élection présidentielle peut être lu de deux manières. Si l’on suit une grille de lecture politique, on peut comptabiliser trois blocs idéologiquement cohérents et de force comparable. La droite néolibérale rassemble 32,63 % des voix autour des candidatures d’Emmanuel Macron et de Valérie Pécresse ; l’extrême droite identitaire (Le Pen, Zemmour et Dupont-Aignan) constitue un deuxième bloc qui pèse 32,28 % des suffrages ; enfin, le total des voix de gauche et d’extrême gauche représente un dernier bloc rassemblant 31,94% de l’électorat. Reste les 3,13% des électeurs de Jean Lassalle, inclassable politiquement.

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Contre le populisme de gauche

À chaque fois que je lance sur les réseaux sociaux une discussion sur le sujet de la politique sanitaire, je me retrouve à devoir gérer des commentaires hostiles et bourrés de fausses informations et je reçois moultes accusations comme quoi je serais devenu un traite à la cause.

(Par contre quand je livre une tribune détaillée et argumentée sur la présidence de l’UE je reçois beaucoup moins de commentaires.)

Ceux qui croient que j’ai changé d’opinion ne m’ont sans doute jamais lu correctement. Je me suis toujours exprimé sans aucune complaisance contre les tenants de la pensée magique. Et si je critique les économistes mainstream, les néolibéraux, le fonctionnement de l’UE et du marché unique et les dérives d’une certaine gauche tentée par le populisme c’est au nom des mêmes principes et c’est parfaitement cohérent avec tout le reste.
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Coralie Delaume, souverainiste du peuple

Cet article est une version légèrement modifiée et complétée d’une tribune publiée le 20 septembre 2021 par le Figarofox.

Le livre posthume de Coralie Delaume, Nécessaire souveraineté, vient de sortir chez Michalon, son éditeur. Son décès prématuré à l’âge de 44 ans, le 15 décembre 2020, a marqué la brutale conclusion d’une pensée qui n’a jamais cessé d’évoluer, de se remettre en question, de s’affiner et de s’affirmer.

Jusqu’au bout, elle travailla. Ce petit ouvrage, achevé au début de l’été 2020 et qui se retrouve aujourd’hui dans les librairies, n’est qu’un élément d’une réflexion bien plus vaste qu’elle avait engagée sur la Nation et sur l’État. Le sujet à vrai dire est immense, partiellement délaissé par les intellectuels de plateaux télévisés qui préfèrent souvent verser dans le combat identitaire ou scander de grandes phrases sur les libertés plutôt que de s’intéresser aux prérequis de la démocratie, à ce qui la fait vivre et à ses conséquences.

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Qu’implique la décroissance du PIB?

Posons le problème directement.
Faire décroitre le PIB revient à diminuer l’ensemble des revenus monétaires. Ces revenus monétaires correspondent soit aux revenus directs des ménages (revenus du travail et du patrimoine) soit à leurs revenus indirects (prestations sociales en nature ou en espèce, valeur de leur capital financier).

La question à laquelle il faut répondre est donc la suivante:
Si l’on part du principe qu’il n’est pas possible de découpler la croissance du PIB et les atteintes environnementales, alors comment rendre acceptable politiquement et socialement une baisse du PIB, soit une diminution globale des revenus, dans des sociétés dominées par la défiance envers les institutions après 30 ans de néolibéralisme? Continuer la lecture

Comment la retraite à points va faire baisser les pensions

Tribune publiée sur le blog Alter éco des Économistes atterrés

Tandis que les experts1 se penchent sur l’étude d’impact annexée au projet de loi sur les retraites et pointent ses insuffisances ainsi que, ce qui est bien plus grave pour la qualité du débat, ses biais méthodologiques et son insincérité, un chiffre mérite plus particulièrement notre attention, celui de la trajectoire des dépenses de retraite prévues à l’horizon 2050. Continuer la lecture

De l’attractivité en général et du macronisme en particulier

Le 20 janvier dernier, profitant du passage à Davos de l’élite économique mondiale, Emmanuel Macron a reçu avec faste 200 grands patrons au château de Versailles afin officiellement de valoriser le label « Choose France » qui vise à inciter les entreprises du monde entier à investir et à créer des emplois sur notre territoire. Ces 200 patrons, c’est 50 de plus que l’année dernière, lorsque l’opération fut lancée pour la première fois. Au menu de cette entreprise de charme, une mise en avant des réformes et des incitations fiscales qui se sont multipliées ces dernières années au bénéfice des entreprises, et en particulier des multinationales. Continuer la lecture

David Cayla: « ni croissance verte ni décroissance »

Interview accordée à la revue Le Comptoir.

Êtes vous plutôt croissance verte ou décroissance ?

Difficile de raisonner à partir de tels slogans. Je suis pour une société qui parvienne à créer des richesses de manière soutenable, c’est-à-dire en préservant les conditions économiques, sociales et environnementales de leur production. La croissance renvoie à l’idée d’une hausse continue de la richesse produite, une richesse elle-même mesurée en valeur. À partir du moment où cette richesse est produite dans des conditions soutenables, rien ne s’oppose à la croissance de celle-ci. Inversement, décroitre une production de richesse qui n’est pas produite de manière soutenable ne résout aucun problème de fond. La décroissance par exemple de 10% d’une production réalisée de manière insoutenable permet sans doute d’acheter du temps, mais ne répond aucunement aux problèmes de long terme. Bref, ni croissance verte (un slogan creux) ni décroissance. Continuer la lecture

Plan Juncker, loi Macron : dangereux socialement, inefficaces économiquement

Il a suffi que l’INSEE publie une note de conjoncture un peu moins pessimiste que d’habitude pour que la presse, la communauté des éditorialistes et, bien sûr, le gouvernement se félicitent par avance d’une croissance enfin retrouvée. Rien d’extraordinaire, pourtant, dans ces chiffres. L’INSEE prévoit pour la France une croissance de 0,3% aux deux premiers trimestres de l’année 2015. À comparer avec les 0,2% qui étaient prévus l’année dernière à la même époque pour les deux mêmes trimestres de 2014. En fait de croissance, celle-ci a été nulle au premier trimestre 2014 et négative (-0,1%) au deuxième. Comme on le sait, la prévision est un exercice délicat, surtout quand elle concerne l’avenir.
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Pourquoi le « pacte de responsabilité » ne créera pas d’emploi

Comment lutter contre le chômage ? Interrogé en septembre dernier sur TF1, le chef de l’Etat répliquait par le raisonnement suivant : « si on veut des emplois, si on veut des productions en France, si on veut que nos enfants aient une perspective de carrière, il faut des entreprises ». « Il faut que les entreprises se sentent soutenues » ajouta-t-il avant de se proclamer « président des entreprises ». Le « pacte de responsabilité », annoncé quelques mois plus tard, est dans le droit fil de cette logique. L’idée est la suivante : puisque les entreprises sont responsables de la création d’emploi il faut les « responsabiliser », c’est-à-dire négocier avec elles un accord donnant-donnant. Moins de prélèvements d’un côté, des engagements en matière d’emplois de l’autre. Continuer la lecture