David Cayla: « La loi de l’offre et de la demande est une fable »

Interview accordée au journal Le Soir. Propos recueillis par Dominique Berns.

Q : Vous dénoncez les modèles trompeurs utilisés – en général, de bonne foi, dites-vous – par la majorité des économistes. Une chose peut surprendre : vous ne visez pas les constructions les plus sophistiquées, mais le cœur du raisonnement économique, la fameuse « loi de l’offre et de la demande. » Pourquoi ?

R : Cette « loi » est la pierre angulaire de l’économie dite « néo-classique », dominante aujourd’hui. Mais c’est surtout une construction historique née à la fin du XIXème siècle, résultat d’un compromis entre les économistes : ceux qui, comme les auteurs classiques, identifiaient l’origine de la valeur du côté du coût de production (l’offre) ; et ceux qui ont cherché, un siècle plus tard, à fonder la valeur sur l’utilité pour le consommateur (la demande). En associant les deux de manière parfaitement symétrique, la théorie néo-classique a mis le marché au cœur de son analyse tout en cherchant à montrer que les prix s’imposaient d’eux même à l’ensemble des acteurs et qu’ils n’étaient donc contrôlés par personne en particulier. Selon cette théorie, offre et demande poussent chacune dans des sens opposés : quand le prix augmente, l’offre croît et la demande décroit. Aussi, le prix d’équilibre serait celui qui se trouve à l’intersection des deux courbes. Malgré l’absence de vérification empirique, les économistes craignent de rompre ce compromis et ne remettent jamais cette théorie en question. Continuer la lecture

David Cayla: « ni croissance verte ni décroissance »

Interview accordée à la revue Le Comptoir.

Êtes vous plutôt croissance verte ou décroissance ?

Difficile de raisonner à partir de tels slogans. Je suis pour une société qui parvienne à créer des richesses de manière soutenable, c’est-à-dire en préservant les conditions économiques, sociales et environnementales de leur production. La croissance renvoie à l’idée d’une hausse continue de la richesse produite, une richesse elle-même mesurée en valeur. À partir du moment où cette richesse est produite dans des conditions soutenables, rien ne s’oppose à la croissance de celle-ci. Inversement, décroitre une production de richesse qui n’est pas produite de manière soutenable ne résout aucun problème de fond. La décroissance par exemple de 10% d’une production réalisée de manière insoutenable permet sans doute d’acheter du temps, mais ne répond aucunement aux problèmes de long terme. Bref, ni croissance verte (un slogan creux) ni décroissance. Continuer la lecture