Le revenu universel et ses alternatives

Entretien avec Mathilde Nutarelli pour Le Temps des ruptures

Avec la pandémie et les difficultés économiques qui en ont découlé, le revenu universel a le vent en poupe. Expérimentations dans certaines régions ou pays, élus demandant de le mettre en place, … Le sujet est omniprésent depuis un an. C’est une notion très large qui englobe plusieurs visions. De la version libérale de Milton Friedman au salaire à vie de Bernard Friot, les écarts sont importants, tant sur le plan idéologique que pratique. Pourriez-vous nous exposer brièvement les différentes philosophies qui sous-tendent ce concept ?

Derrière le revenu universel, il y a beaucoup de conceptions différentes, qui vont de la plus libérale à la plus communiste. La proposition de Milton Friedman n’est pas tout à fait un revenu universel, c’est plutôt une allocation minimale, un impôt négatif. Il propose que les personnes ayant un revenu inférieur à un certain seuil puissent toucher une allocation complémentaire. Chez Bernard Friot, à l’inverse, l’objectif est de remplacer le capitalisme. Pour cela, il propose que tout le monde ait un revenu socialisé qui se substitue au revenu de la sphère privée. Entre ces deux principes, il y a de grandes différences. On peut aussi citer le « Liber » des libéraux à la Gaspard Koening, le revenu de base du Mouvement Français pour un Revenu de Base (MFRB), ou encore le revenu universel d’existence de Benoît Hamon. Continuer la lecture

L’avenir selon Attali

En 316 décisions, le rapport Attali ne s’est pas contenté de proposer quelques mesures économiques, mais a cherché à mettre en musique l’idéologie sarkozienne : travailler plus, libéraliser, communautariser. C’est le programme des réformes à venir.

« Ceci n’est pas un rapport, ni une étude, mais un mode d’emploi pour des réformes urgentes et fondatrices ». C’est par ces mots que commence le Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française. Et comme tout mode d’emploi, il ne se contente pas de simples « propositions » laissées à l’arbitrage du débat public, mais il dicte et « décide ». Toute loi doit être « efficace », et seuls des experts comme Attali sont à même d’en juger. On se souvient de la proposition iconoclaste de Ségolène Royal qui voulait instaurer des « jury citoyens » pour évaluer l’action de leurs représentants. Le rapport Attali prend acte de l’incompétence des citoyens et des élus pour prendre les « bonnes » décisions et propose donc de « faire évaluer ex ante et ex post tout projet de loi et de règlement » par des comités d’experts (décision 231). De même, chaque service public, chaque agent, chaque dépense, devront être évalués par un système d’organismes indépendants, en concurrence les uns avec les autres (décision 228 à 230). Continuer la lecture