Reliures des fonds patrimoniaux de la BUA : exposition du cabinet de curiosités, janvier-juin 2025
La BU d’Angers vous propose, à partir du 15 janvier 2025, un choix de reliures et brochages sélectionnés dans le fonds ancien et dans les fonds littéraires.
L’artisanat de la reliure est indissociable de l’apparition du livre en « codex », c’est-à-dire en pages feuilletables cousues sous une couverture protectrice, forme attestée dès le Ier siècle. La reliure est d’abord fonctionnelle : elle assure la cohésion du volume et le protège des dégradations. Mais elle joue également un rôle esthétique. Si la plupart des manuscrits médiévaux portent des reliures peu ou pas ornées, certains volumes prestigieux reçoivent un habillage somptueux. Le livre de l’époque moderne, dont la diffusion est facilitée par l’invention de l’imprimerie, connaît une gamme variée de reliures adaptées aux goûts et à la fortune des propriétaires, de la reliure de grand luxe ornée et dorée au parchemin ordinaire. Le XVIIIe siècle nous livre même de nombreux volumes restés simplement brochés et couverts de papier. L’industrialisation du livre au XIXe siècle fait naître un nouveau type de reliure, le « cartonnage d’éditeur », dont la présentation clinquante est destinée à séduire le jeune public. De nos jours, entre éditions courantes aux couvertures illustrées de grande série, et reliures artisanales (pour un marché de niche), il reste une place pour des reliures industrielles décoratives venant habiller des textes classiques, ou au contraire souligner l’originalité de poètes ou d’artistes diffusés par de petits éditeurs.
L’époque moderne, XVIe-XVIIIe siècles
Les reliures des livres anciens de la BUA sont en majorité de facture courante, et par là même très représentatifs des bibliothèques d’Ancien Régime. Peu d’exemplaires de notre collection peuvent être qualifiés de « luxueux ». Nous possédons en revanche de nombreux volumes brochés à couverture de papier, témoins de la démocratisation du livre à la fin de l’Ancien Régime.
- Instruction pastorale de Monseigneur J. Joseph Languet, Paris, 1734
Exemple de reliure économique, faite en récupérant, pour la peau de couvrure, un acte notarié en parchemin, datant du XVIIe siècle. (R 01 088)
- Choix de couvertures en papier décoré des XVIIe et XVIIIe s.
Les livres pouvaient être vendus sous une modeste couverture en papier, dans l’attente d’une reliure définitive en cuir – reliure qui, souvent, n’a pas été réalisée. Notre échantillon présente des spécimens de papier marbré (ici en noir, assorti à l’ouvrage : une oraison funèbre), à la colle (ici teintée avec un pigment rose), et dominoté (à motifs imprimés à la planche)
- Choix de reliures à dos doré, XVIIIe-XIXe s.
L’esthétique des bibliothèques anciennes reposait sur l’alignement des reliures au dos soigneusement décoré par des motifs de fleurons pointillés, glands, chardons, ou grenades. En fonction de la mode, le relieur pouvait réaliser un dos long (lisse) ou à nerfs (ficelles de couture saillantes).
- J.-B.-Louis Gresset, Œuvres choisies, Paris, Saugrain, an II.
Reliure de luxe, fin XVIIIe s., style Louis XVI tardif, maroquin rouge, gardes de soie, tranches dorées. (R 00 425).
Reliures d’éditeurs, XIXe-XXe siècles
- Les rosières, ill. par Lambert, S.l., s.n., vers 1817.
Livret publié à l’occasion du mariage du duc de Berry. Couverture et étui cartonnés roses, en accord avec le sujet. (Non coté, prov. La Motte-Baracé)
- Jules de Marlès, Anna ou la piété filiale, Tours, Mame, vers 1840.
Roman édifiant pour la jeunesse, illustré de gravures sur acier. Cartonnage d’éditeur, gaufré et doré, typique du livre-cadeau de l’époque romantique. (Non coté, prov. La Motte-Baracé)
- Marie Mallet, Contes de tous les pays, Paris, Vermot, [1859].
Cartonnage d’éditeur : pour attirer le public enfantin, l’éditeur a fait réaliser cette spectaculaire couverture illustrée par le procédé de la lithographie en couleurs. (Non coté, prov. La Motte-Baracé)
- Virgilio Cepari, Vies de saint Louis de Gonzague et de saint Stanislas Kotska, Tours, Mame, 1863.
Reliure d’éditeur, basane noire décorée à froid, de style “romantique”. Grâce à l’utilisation de la basane (peau de mouton bon marché) et de plaques permettant le gaufrage rapide de motifs raffinés, l’éditeur Mame peut réaliser des reliures semi-industrielles d’aspect luxueux, pour les livres de piété qui constituent sa spécialité (R 00 425)
- René Bazin, La sarcelle bleue, Tours, 1928
R. Bazin (grand-oncle d’Hervé Bazin) connut en son temps un grand succès comme romancier, chantre du terroir et des valeurs traditionnelles. Couverture d’éditeur, toile bleue, premier plat illustré d’une gravure en couleurs par G. Dutriac. (R 30 109)
- Paul d’Ivoi, Dr Mystère, Paris, Furne, 1933 (Collection Voyages excentriques)
De l’œuvre de Paul d’Ivoi, romancier à succès dans le style de Jules Verne, on ne connaît plus guère que Les cinq sous de Lavarède. Cartonnage d’éditeur, percaline rouge à décor doré manifestement inspiré des Voyages extraordinaires de J. Verne publiés par Hetzel au XIXe s. (R 31 849)
Le XXe siècle, entre reliure d’art traditionnelle et procédés industriels
- Octave Mirbeau, Dingo, Paris, Ambroise Vollard, 1924
Ex. n° 227/370. Reliure artisanale signée de Lucette H. Lévy, marocain havane avec au plat supérieur, incrustation d’une pièce de cuir noir portant une silhouette de chien. Ce travail, dû à une relieuse active dans les années 1920, illustre l’une des tendances de la reliure d’art contemporaine : la couverture figurative, conçue en lien avec le texte. (R 60 464).
- Edouard Pignon, Battages et Pousseurs de blé, Paris, Cercle d’art, 1962
Album réunissant la reproduction de plusieurs dizaines de dessins en noir et en couleurs que le peintre Édouard Pignon (1905-1993) fit dans le village de Filacciano en Italie. In-folio relié pleine toile éditeur illustrée en couleurs. (8 075880)
- Pierre Della Faille, Mise à feu, [Le Jas du Revest Saint-Martin], R. Morel, 1968
Recueil de poèmes. Reliure de l’édition comportant une peinture de Cottavoz incrustée dans le premier plat. (R 140 585)
- Charles Le Quintrec, L’Arvor : cent aquarelles et dessins, illustré par Paul Maudonnet, Gennes, 1986
Le poète breton Ch. Le Quintrec s’associe au peintre angevin P. Maudonnet pour célébrer la Bretagne. Ex. H.C. n° 7. En feuilles, sous couverture, chemise rigide en veau bleu nuit frappé d’un motif doré, et étui. De la bibliothèque du poète Jean Laugier. (R 160 317)
- Reliures décoratives et pastiches
Choix de textes classiques ou contemporains (Les Mille et une nuits, La Fontaine, Jules Verne, Clara Malraux, Montesquieu, etc.) dans des reliures de série (en plein cuir ou en simili) reprenant les codes de la reliure traditionnelle : dos doré, motifs sur le plat estampés à froid ou dorés. Ces reliures « de club », souvent critiquées par les bibliophiles avertis, séduisent un public fidèle d’amateurs de livres de bonne facture et de bel effet dans une bibliothèque.
- Roger Martin du Gard, Les Thibault, t. 2, Paris, Gallimard, 1946
Édition soignée du cycle romanesque qui valut à son auteur le prix Nobel de littérature. L’ouvrage est illustré par Jacques Thévenet (1891-1989), dans une reliure d’éditeur à décor d’entrelacs.