« Où sont les femmes caricaturistes ? ». C’est la question que s’est posée Cécile Gladel dans un article de Radio-Canada.ca en janvier 2015. Au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo, la journaliste constate que la part des femmes caricaturistes reste encore peu représentée. Alors, comme le pensait le dramaturge et poète britannique William Congreve en 1695, les femmes n’ont-elles pas d’humour ?
Des études prouvent pourtant que l’humour féminin existe bel et bien. Le monde anglo-saxon s’intéresse tôt à cette question et publie de nombreux ouvrages sur le sujet. En France, la recherche sur l’humour des femmes apparaît plus tardivement. En 1994, l’Université Paris VIII accueille une journée d’étude sur la différence sexuelle dans l’humour. Ce n’est que six ans plus tard qu’est publiée la première recherche française exclusivement consacrée à l’humour féminin : STORA-SANDOR Judith, PILLET Elisabeth, « Armées d’humour : approches du discours comique féminin », in Humoresques, n°11, 2000. Cet ensemble de textes se propose d’étudier le thème à travers diverses approches (historique, conceptuelle, culturelle), des portraits dont celui de Christine de Pizan et à différentes échelles (nationale et internationale). Vous trouverez cet ouvrage dans le fonds du Réseau féministe « Ruptures » conservé au Centre des archives du féminisme (cote 49 AF 12).
Parmi les autres thématiques abordées dans le fonds « Ruptures », la parité tient une place importante avec deux mètres linéaires de documentation. C’est également l’un des thèmes qui émergent des dessins de la caricaturiste française Catherine Beaunez. Née en 1953 de parents militants, cette dessinatrice indépendante décide de prendre la plume humoristique pour défendre l’égalité entre les femmes et les hommes. Membre du Collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme et de Cartooning for Peace, ses dessins sont apparus dans de nombreux journaux tels que Le Monde, L’Humanité et Causette. Catherine Beaunez est aussi l’autrice de 5 albums et d’un blog. Drôle et engagée, elle n’arrive cependant que difficilement à se faire publier dans un univers très masculin. Certains de ses dessins lui ont même valu la censure parmi lesquels figure celui de l’Assemblée nationale à découvrir dans On les aura ! (2001), un album disponible à la bibliothèque universitaire Belle-Beille (cote 3 096915). Ainsi, elle-même confrontée aux inégalités dans son métier, Catherine Beaunez continue son combat contre le sexisme par le biais de caricatures qui peuvent déranger, mais comme elle le déclare dans un reportage de 1999 diffusé sur l’INA: « Il y a de quoi être dérangé en ce moment.» 18 ans après, le chemin est encore long…
Le 18 mai 2017 par Candice Payet