Les 13 et 14 avril derniers, la Ligue du droit international des femmes (LDIF) et la Coordination française pour le lobby européen des femmes (CLEF), dont certaines archives sont conservées au Centre des archives du féminisme, organisaient des manifestations à Paris contre le sexisme sportif en Iran et en Arabie saoudite. L’iranienne Darya Safai et d’autres militantes se sont rassemblées au pied de la Tour Eiffel autour du slogan : « Let Iranian women enter their stadiums ! ».1 La date et le lieu de ces mobilisations ne furent pas choisis au hasard car elles interviennent à Paris, ville candidate aux Jeux Olympiques (JO) de 2024, et un mois avant la Commission d’évaluation du Comité international olympique (CIO). Dans un article paru sur Francetvsport.fr en 2013, la présidente du LDIF, Annie Sugier, dénonce cet apartheid sexuel au même titre que l’apartheid racial d’Afrique du Sud, pays exclu officiellement des JO de 1970 jusqu’à la fin de son régime ségrégationniste au début des années 1990. Vous trouverez dans notre fonds féministe les archives personnelles d’Annie Sugier, ainsi que ses ouvrages dont Femmes voilées aux jeux olympiques publié en 2012 aux éditions Jourdan (cote 3 096817).
Ce n’est pas la première fois que des appels au boycott ont lieu pour dénoncer la discrimination sportive contre les femmes et le non-respect de la charte olympique qui annonce pourtant clairement que : « La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Charte olympique doit être assurée sans discrimination d’aucune sorte, notamment en raison de la race, la couleur, le sexe, l’orientation sexuelle, la langue, la religion, les opinions politiques ou autres, l’origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. » Le fonds du Réseau féministe “Ruptures” nous rappelle que le 10 janvier 1995, le LDIF lance le Comité “Atlanta Plus” en vue des JO de 1996. Des coupures de presse conservent aussi en mémoire l’interdiction faite à la première championne olympique algérienne Hassida Boulmerka de participer aux Championnats du Monde de Stuttgart en 1993. Aujourd’hui encore, l’intégrisme islamiste d’Arabie saoudite et d’Iran interdit aux femmes d’être spectatrices d’événements sportifs masculins. Le 13 mai 2016, une jeune Iranienne, surnommée Shakiba sur Instagram, se travestit en homme et réussit à entrer dans le stade de Téhéran lors d’un match de football. En février 2017, l’Iran fait un premier pas en autorisant les femmes à assister au tournoi international masculin de beach-volley. Toutefois, il reste beaucoup à faire pour que l’égalité devienne totale. Concernant les JO 2024, des discussions entre le Collectif de solidarité contre l’apartheid sexuel dans le sport et le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ont eu lieu il y a 3 jours à Paris afin de convaincre que cette ségrégation sexuelle est aussi importante que l’apartheid racial.
Sujet de société, le thème « Femmes et sport » fait partie des dossiers du fonds « Ruptures » (cote 49 AF 390). A travers des coupures de presse, des tracts, des données statistiques et d’autres imprimés, le fonds en montre les différents aspects : supportrices, sportives de haut niveau ou en loisir, éducation sportive des filles, etc. L’accès des femmes aux postes de responsabilité dans le sport est également abordé et fait écho à notre actualité car le 17 mai 2017, Laura Flessel est devenue la neuvième femme engagée à la tête du ministère des Sports, sous la Ve République.
Le 18 mai 2017, Candice Payet
1 En français : « Laissez les femmes iraniennes entrer dans leurs stades ! »