La gestion des utilisateurs et auteurs dans Okina

Billet un peu technique à destination des bibliothécaires et administrateurs d’archives ouvertes.

Voici, rapidement, la manière dont les auteurs sont gérés dans Okina. Comme expliqué précédemment, nous utilisons Drupal et le module Biblio, augmenté par nos soins.

Les “users” Drupal

Le CMS Drupal comprend une table “users”, référençant l’ensemble des personnes qui accèdent à la plateforme en mode authentifié.

Connexion/authentification

Connexion CAS classique (module Drupal prêt à l’emploi) avec les identifiants habituels.

Création du compte user

  • Pour les utilisateurs lambda de la plateforme (étudiants de l’UA, par exemple, et toute personne qui n’est pas amenée à déposer dans Okina, seulement à consulter), un paramètre du module CAS permet la génération automatique du compte à la première connexion.
  • Pour les chercheurs et ITRF/Biatoss des laboratoires, nous avons choisi de procéder autrement : import via csv des informations des comptes (dont le laboratoire d’appartenance) et attribution automatique du rôle permettant d’accéder aux dépôt et services. Ainsi les chercheurs n’ont plus qu’à se connecter et peuvent directement utiliser l’application.

Enrichissement du profil user

Les chercheurs peuvent charger leur photo, modifier l’url permettant d’accéder à leur profil, indiquer les adresses de leurs profils sur les réseaux sociaux, leurs sites personnels, leur numéro ORCID, leur biographie, CV, etc. Nous ajouterons probablement un champ ID HAL, lorsque HAL v3 sera en production.

Bien sûr la génération de la liste des publications est automatique. Basé sur ces publications, nous proposons un encart présentant les mots-clés les plus utilisés par le chercheurs. Nous pourrions proposer bien d’autres informations, à l’échelon du chercheur ou de celui du laboratoire : revues ou éditeurs les plus “utilisés” par les chercheurs pour publier, par exemple. Nous le ferons sans doute un jour, si cela intéresse nos chercheurs.

Les auteurs Biblio

Le module Biblio génère une table des autorités auteurs présents dans les publications. Cette table est liée à celle des users comme suit.

Lien entre les tables

On peut indiquer dans la fiche auteur le user correspondant, ou inversement. Le module biblio permet d’ouvrir ce paramétrage aux users eux-mêmes, nous avons choisi de nous en occuper directement. De plus nous avons automatisé la création de l’autorité auteur liée à l’import des comptes users, lorsque celle-ci n’existe pas encore.

Gestion des doublons auteurs

Il va falloir suivre l’évolution de la table auteur de près, pour éviter qu’elle “dégénère”. En natif, un repérage des doublons potentiels est disponible (surlignage dans l’interface de gestion ; repérage basé sur l’homophonie + suggestions de noms aux sonorités/lettres proches). Le module Biblio permet de fusionner des auteurs, en gardant ou non les formes rejetées (pour qu’elles ne soient pas recréées à chaque fois dans la table auteur). Il permet également de simples liens entre autorités. Nous avons remarqué des petits dysfonctionnements du module Biblio “natif”, corrigés par nos soins (ces corrections intègreront le module communautaire et sont bien entendu dès à présent disponibles pour qui en aurait besoin).

Auteurs orphelins

Le module Biblio met automatiquement de côté les auteurs ne figurant plus dans aucune référence bibliographique, et permet de les supprimer à l’unité ou en lot, ou bien entendu de les conserver.

Faire-part

vertPoint d’étape de printemps, il est temps d’annoncer l’heureux événement : Okina, l’archive ouverte angevine, est ouverte en v.1 depuis 2 mois maintenant. Pour le moment, l’accès est réservé à la communauté angevine, et nous espérons une inauguration officielle au dernier trimestre 2014.

En attendant, le travail se poursuit. La peinture est encore fraîche, nous apportons des retouches ici ou là…

Développements

Côté technique, l’essentiel y est, et même un peu plus : création de notice ou import automatisé, diffusion des fichiers entièrement paramétrable, édition de listes (plusieurs modèles, plusieurs styles bibliographiques, plusieurs formats d’affichage et d’export), moteur de recherche “facetté”, profils chercheurs, etc.
Nous commençons les développements et paramétrages pour permettre la gestion des tirés à part sur les documents en accès restreint. Restera bien entendu le connecteur HAL, et nous attendons impatiemment le passage en production de HAL v.3 pour nous lancer dans ce développement.

Accompagnement

Huit laboratoires ont été intégrés : SOPAM, SONAS, MOLTECH, LARIS, GRANEM, CERHIO, 3L.AM, LAREMA. Cela signifie que leurs notices bibliographiques ont été reprises par un membre de l’équipe AO (Emmanuel Lemoine ; l’équipe compte deux autres personnes, Baptiste Judic, développeur, et moi-même) pour la période 2008-2012, et que nous formons les chercheurs au dépôt pour qu’ils soient autonomes pour la suite. Aujourd’hui 2 juin, une soixantaine de chercheurs ont bénéficié d’une formation pratique (en plus des présentations générales), Okina compte 2807 références bibliographiques, dont 193 avec texte intégral. Les retours sont positifs, la simplicité d’utilisation saluée (c’était un objectif important).
Nous poursuivons le travail de promotion et de formation auprès des chercheurs “1ère vague” ; parallèlement, l’intégration de nouveaux laboratoires est en cours.

[Crédit photo : Sans titre, Sabrina Jelken – CC BY-NC-SA]

Combien ça coûte ?

Pour répondre à une sollicitation concernant le coût de notre projet, voici un bref inventaire des moyens mobilisés.

Équipements

Lors d’un premier chiffrage estimatif, réalisé avec la direction du pilotage de l’Université, les frais techniques (mise en place d’une machine virtuelle, son administration, sa maintenance, ses sauvegardes, l’ajout d’espace disque) ont été estimés par la direction du numérique à un peu moins de 12000€ HT sur 5 ans.

Archivage

Si l’archivage pérenne est assuré par le CINES, l’abonnement au service coûte environ 5000€ HT par To et par an.

Ressources humaines année 2013-2014

La lettre de mission, datée de mai 2013 et signée du Président, mentionne les RH dévolues au projet de 2013 à août 2014. En théorie sont mobilisés un bibliothécaire chef de projet (temps plein), un bibliothécaire contractuel (temps plein), un développeur (temps plein), un ASI recherche à mi-temps, + une assistance à la maîtrise d’ouvrage, assurée par un ingénieur de recherche de la direction du numérique, pour notamment faciliter le travail inter directions.

Dans les faits, l’équipe est constituée d’un développeur à temps plein, mis à disposition par la DDN et remplacé localement par un contractuel (= 1 recrutement), d’un pseudo-bibliothécaire à temps plein (qui n’a de bibliothécaire que le rattachement ; il a travaillé dans un laboratoire sur la gestion des références bibliographiques et la production de rapport AERES, et est chargé de la reprise du rétrospectif des laboratoires pilotes puis de la formation des chercheurs au dépôt ; = 1 recrutement contractuel), et d’une bibliothécaire chef de projet. Nous travaillons ponctuellement avec les autres services (direction de la recherche, service communication, direction du numérique, service bibliothèque numérique, …), sur des points précis (AMO, référentiel des laboratoires, extractions Apogée/Harpège, communication, etc).

Soit, en résumé, mobilisation d’une bibliothécaire “existante” + 2 recrutements contractuels.

[Edit : pas de coût de logiciel puisque nous utilisons un logiciel libre, Drupal, sans recours à un prestataire extérieur.]

France : quel agenda politique pour l’Open access ?

Deuxième billet sur Berlin 11, cette fois sur la position française exprimée par Roger Genet lors de la première session “Open access on the political agenda”, à la tribune puis au cours de la pause en fin de session.

Roger Genet a rappelé l’engagement fort de la France en faveur de l’Open access et développé trois points sur lesquels je voudrais revenir pour exprimer un point de vue strictement personnel :

  1. Il y a contradiction entre la diffusion ouverte et la préservation des systèmes de diffusion.
  2. La France, qui soutient l’OA sur tous les fronts, archives et publications, ne peut pas adopter une politique nationale en faveur d’un modèle car aucun n’est susceptible d’être adopté par tous.
  3. L’Open access est un mouvement “bottom-up”, tout est entre les mains du chercheur, une politique nationale fixant clairement un cadre réglementaire serait nécessairement malvenue.

1. “Disruption is not a bug, it’s a feature”

Roger Genet a expliqué que la politique Open access de la France se déclinait en 4 axes, présentés dans cet ordre :

  1. discuter avec les éditeurs, notamment des durées d’embargo
  2. promouvoir l’archive ouverte HAL (voie verte)
  3. promouvoir la publication en libre accès avec OpenEdition (voie dorée, modèle freemium)
  4. poursuivre le programme Persée pour la numérisation et la mise à disposition en ligne de revues papier.

Il a enfin souligné l’importance de préserver les systèmes de diffusion actuels.

On peut se réjouir des initiatives publiques citées. Il est absolument indéniable que HAL ou OpenEdition participent activement au développement de l’Open access en France. Sans ces projets, c’est sûr, nous n’aurions pas grand-chose à faire valoir. Mais on peut aussi s’étonner de voir placer en priorité numéro un (à moins que l’ordre de présentation, explicitement numéroté, ne soit pas représentatif de l’ordre de priorité ?) la négociation avec les éditeurs, et la question de leur préservation.

Comme l’a expliqué Mike Taylor lors de son intervention, la perturbation que représente l’Open access, chien dans le jeu de quilles d’éditeurs privés bien installés, n’est pas un dysfonctionnement : c’est une caractéristique intrinsèque de ce mouvement. Oui, le crétacé devait finir et les dinosaures disparaître pour que les mammifères se développent au paléocène. L’évolution de l’édition scientifique, recentrée sur la valeur ajoutée et non la simple diffusion, est à la fois urgente et inexorable. Plutôt que le freiner ou le nier, comme le voudraient certains groupes de pression d’éditeurs, il faut au contraire aider ce changement. Tout l’argent public qu’on investira pour maintenir en l’état l’écosystème est de l’argent perdu. Espérons que cet argent, s’il est utilisé pour les éditeurs privés plutôt que pour le développement de l’édition publique en OA, servira bien à accélérer radicalement cette mutation.

2. La stratégie du non-choix, aussi connue sous le nom de stratégie de l’âne de Buridan

Il est tout à fait louable de poursuivre les initiatives dans les deux voies. Mais en quoi cela empêche-t-il le pays d’adopter un mandat clair faisant d’une des deux voies un passage systématique pour les chercheurs ? M. Genet a expliqué que la diversité des pratiques disciplinaires et des écosystèmes de diffusion était telle qu’aucun modèle ne pouvait être adopté par tous. Il me semblait au contraire que les archives ouvertes présentaient cet avantage de pouvoir être utilisées par les chercheurs de toutes les disciplines, notamment parce qu’elles ne remettent pas en cause la liberté académique de l’auteur en matière de choix d’éditeur. Pourquoi donc ne pas opter pour un dépôt systématique des publications financées sur fonds publics dans des archives ouvertes, comme cela a été officiellement décidé dans d’autres pays ? Encourager l’Open access ne suffit pas, et adopter un mandat en faveur d’une des deux voies n’équivaut pas à rejeter l’autre, cela accroît juste la lisibilité de la politique nationale pour les chercheurs.

Ici je voudrais également revenir sur une phrase entendue à la pause, disant, en substance, que le problème des archives ouvertes était qu’il n’y avait pas de reviewing. C’est méconnaître le fonctionnement des archives ouvertes. Dans une archive, on peut déposer toutes sortes de documents, des articles parus dans des revues à comité de lecture, également des working papers. On trouve donc dans les archives comme HAL à la fois des publications validées par un comité de lecture ET d’autres types de documents, chacun clairement identifié. Le modèle de base, c’est que le reviewing ne se fait pas dans l’archive mais chez l’éditeur. Et aujourd’hui d’autres modèles de validation se développent pour cautionner a posteriori les preprints non publiés (le modèle des épirevues). Dans tous les cas, archive ouverte n’est en rien synonyme d’absence de validation scientifique.

Quand le “bottom” demande l’aide du “top” (et a parfois l’impression de crier dans le désert)

Pour le ministère, donc, l’Open access est un mouvement “bottom-up”, son succès dépend de la volonté des chercheurs. Au contraire, Sely Costa a fortement insisté sur le nécessaire double mouvement, un courant partant des acteurs eux-mêmes, l’autre “top-down” soutenant le premier (et par soutien il faut entendre soutien en actes). Une discussion informelle a fait entendre cette assertion : on ne peut pas exiger le dépôt en AO, les chercheurs ne l’accepteront pas, et cela sera source de grande confusion pour eux qui ne sauront plus quoi faire, pris entre la chaise du contrat d’édition et celle de la politique nationale.

Au contraire, c’est aujourd’hui que les chercheurs ne savent pas ce qu’ils ont le droit de faire et finissent par ne rien faire du tout ! Et c’est précisément pour leur donner un cadre légal clair que de nombreux pays adoptent des mandats nationaux primant sur les cessions de droit exigées par certains éditeurs. L’Allemagne a même modifié son droit d’auteur pour préserver d’office les droits de diffusion des chercheurs sur leurs travaux (même si cette loi présente elle-même des limites, j’y reviendrai sans doute, c’est tout de même une sacrée avancée au niveau de la démarche !). On se demande ce qui pourrait bien pousser les chercheurs à se révolter contre ce type d’initiative manifestement dans leur intérêt. Comme le souligne le texte du projet de loi :

“Des considérations purement pratiques militent également en faveur d’un droit d’exploitation secondaire : les auteurs sont perdus dans ce contexte aux pratiques disparates des maisons d’édition, et en raison des conditions commerciales relativement complexes des contrats d’édition en matière de droit d’auteur, pour savoir si, et dans quelles conditions concrètes de chacun de ces éditeurs, ceux-ci leur reconnaissent un droit d’exploitation secondaire. Devoir s’en informer ou interroger l’éditeur est ressenti comme une perte de temps de plus trop importante. Ainsi, la proposition législative instaure une garantie juridique : les auteurs comme les institutions scientifiques auront ainsi l’assurance qu’à un moment donné l’auteur a le droit d’autoriser la mise à disposition au public de la contribution qu’il a écrite”

(cf. traduction du projet de loi effectuée par l’INIST).
Les acteurs de terrain, chercheurs et bibliothécaires, ONT BESOIN de l’intervention de leur gouvernement, d’une politique OA engagée, et d’une réforme des modalités d’évaluation de la recherche ; ils n’ont même de cesse de le réclamer, pour preuve encore cette pétition lancée par le groupe CGT-INRA : Pour une politique publique de publication scientifique en libre accès (j’ai toujours l’impression que les éditeurs du privé savent beaucoup mieux se faire entendre que nous-mêmes, acteurs publics, de notre tutelle).

L’adhésion des chercheurs est évidemment un prérequis, mais la puissance publique doit donner armes, protection et plan d’action à ses petits soldats (oui la métaphore est guerrière ; mais elle a le mérite d’être claire). Donc ? Quelles prochaines étapes à l’agenda politique en France ?

Glyn Moody et Mike Taylor : l’Open access, un impératif moral

Les 19 et 20 novembre 2013 s’est tenue la conférence internationale Berlin 11. Au programme du dixième anniversaire de la Déclaration de Berlin, cinq sessions : “Open Access on the political agenda”, “The large picture : where are we today ?”, “The global perspective : OA at work”, “Future challenges” et enfin “Conclusions – a dialog”. À défaut d’une diffusion vidéo, live ou différée, les comptes-rendus d’Elena Giglia sont disponibles en ligne sur le blog Open Electronic Publishing.

J’aimerais dans un premier temps revenir ici sur deux interventions enthousiasmantes, celles de Mike Taylor et Glyn Moody, qui ont tous deux rappelé que l’Open access était avant tout une question éthique.

L’intervention de Mike Taylor est disponible sur son blog en CC-BY, en pdf et ppt. Celle de Glyn Moody est versée au domaine public et je le remercie pour l’envoi des fichiers source et pdf. Les références aux présentations dans ce billet sont indiquées sous la forme (initiales de l’auteur, numéro de slide). Les fichiers pdf des deux présentations sont également disponibles ici :

La publication recherche, une affaire de business ?

NON, répond sans ambiguïté Mike Taylor. “Publishing research is a mission” (MT, 12):

Et d’énumérer ce qu’est l’Open access (MT, 36 et suivantes) :

1. Open Access is about sharing/multiplying
2. Open Access is about justice
3. Open Access is about changing the world
4. Open Access is about unity
5. Open Access is about accepting reality

L’Open access au pied de la lettre : une affaire de liberté(s)

Les deux intervenants ont rappelé le texte exact des grandes déclarations de 2003, Budapest, Bethesda et Berlin. Les trois inscrivent l’Open access dans la logique de la General Public Licence, qui définit les conditions de distribution des logiciels libres en établissant quatre libertés fondamentales :

  • la liberté d’exécuter le logiciel
  • la liberté d’étudier le code
  • la liberté de redistribuer
  • la liberté de modifier et de partager les versions modifiées.

Les trois déclarations évoquent ces libertés (cf. MT 3-6). Citons Berlin :

Open access contributions must satisfy two conditions:The author(s) and right holder(s) of such contributions grant(s) to all users a free, irrevocable, worldwide, right of access to, and a license to copy, use, distribute, transmit and display the work publicly and to make and distribute derivative works, in any digital medium for any responsible purpose, subject to proper attribution of authorship

Littéralement, donc, Open access et Open source ont tout à voir ensemble. Le mouvement de l’Open access, qui concerne la diffusion des articles, mais aussi celle des données, implique l’utilisation des logiciels libres (GM, 13-14) :

Glyn Moody rappelle que Linux, système d’exploitation GNU-GPL, a fait ses preuves et que le libre est même à la base d’énormes succès entrepreneuriaux et commerciaux (GM, 6) :

Enfin, il pointe l’absurdité du système de brevetage des innovations issues de la recherche publique et plaide pour le versement systématique des avancées dans le domaine publique, pour ne pas entraver inutilement le développement qui peut en être fait ; développement source de progrès, mais aussi de richesse.

Freiner le progrès pour préserver un écosystème obsolète n’est pas acceptable

Le développement de l’Open access n’est pas aussi rapide qu’il pourrait l’être, notamment parce qu’on s’obstine à maintenir un système éditorial qui n’a plus de raison d’exister sous sa forme primitive. Aujourd’hui, la diffusion peut être immédiate et n’implique pas de coût de distribution (GM, 10, citant Clay Shirky : “publishing isn’t a job or an industry, it’s a button”) . Refuser ce progrès, endiguer la dissémination des savoirs, calquer le fonctionnement de l’édition en ligne sur le modèle de l’édition papier, pour préserver des intérêts financiers, n’est pas moralement acceptable. Un changement radical de l’écosystème éditorial est indispensable et urgent, et ce tournant n’a rien d’optionnel (MT, 76) :

Les éditeurs doivent désormais tirer leurs revenus de la valeur ajoutée, des services qu’ils apportent, et non de la simple mise en ligne d’un contenu. Mike Taylor rappelle que l’étymologie de “publication” a tout à voir avec le fait de rendre public et que les éditeurs n’ont pas à cacher les articles derrière de hauts et coûteux murs (MT, 65). Enfin, et pour toutes ces raisons, Glyn Moody préconise l’approche ZEN : zero embargo now (GM, 16).

Conclusion

Alors oui, nous sommes encore loin du real Open access, dans les esprits, dans la pratique, pour des questions juridiques, administratives, pour des questions de profits, aussi, surtout. Il va de soi que les initiatives Open access telles que nous les connaissons aujourd’hui, qui en général ne sont pas parfaitement, disons, “GNU-GPL compliant”, n’ont pas à rougir de leur pragmatisme : au point où nous en sommes, il est évident que la priorité est la diffusion des résultats de la recherche, dans les conditions que permettent le système actuel et les contrats signés par les auteurs. C’est une étape déjà majeure dans l’adoption de l’Open access. Mais il est bon de s’entendre rappeler de temps en temps quels buts plus élevés on poursuit ce faisant. Ce genre de présentations est un puissant antidote à la démotivation.

Future perfect (GM, 16) :

Quelles licences de diffusion pour une archive ouverte institutionnelle ?

Ce billet est un compte-rendu de l’entretien téléphonique qu’a bien voulu m’accorder ce jour Lionel Maurel. Je publie ces notes, certaine que ces précisions seront utiles à d’autres promoteurs d’archives institutionnelles…

Une licence pour les métadonnées ?

L’archive institutionnelle est une base de données, son producteur dispose de droits spécifiques et peut apposer une licence. Par ailleurs la base de données appartenant à une institution publique, les données contenues sont de fait des données publiques. Dans notre cas plusieurs licences sont envisageables :

  • Licence ouverte Etalab, créée spécifiquement pour la diffusion des données publiques. Elle équivaut à une licence Creative Commons CC BY. C’est la licence utilisée pour IDref par exemple.
  • ODBL : Open Database License, licence spécifique aux bases de données, équivalent d’une CC BY-SA. Cette licence libre est utilisée par le projet OpenStreetMap. À noter : la réutilisation des données via un moteur de recherche par exemple ne déclenche pas le “share alike”. Celui-ci n’entre en jeu qu’à partir du moment où les données sont modifiées.
  • CC0 : cette licence Creative Commons permet de renoncer à tout droit et de verser l’objet au domaine public par anticipation.

Peut-on utiliser les licences CC pour les articles (ou autres documents sous contrat) ?

Si l’auteur souhaite pouvoir diffuser son travail sous licence CC, le plus simple est de faire apparaître ce point dans le contrat signé avec l’éditeur. Néanmoins, lorsque le contrat signé est une cession de droit non exclusive, alors l’auteur peut librement diffuser son travail, y compris sous CC s’il le souhaite. En revanche lorsque la cession de droit est totale, l’auteur n’a pas cette liberté.
La licence de diffusion devrait donc être mentionnée explicitement dans une clause additionnelle précisant que l’auteur a le droit de déposer et diffuser son travail dans son archive institutionnelle (au moins). L’éditeur pourrait sans doute accepter une licence CC BY-NC, peut-être préférer CC BY-NC-ND.
Dans l’addendum SPARC, le choix d’une licence CC n’est pas évoqué, mais la phrase suivante offre à l’auteur la possibilité d’autoriser un usage non commercial de son travail, droit qui peut donc ensuite être exercé avec une licence CC : “the right to authorize others to make any non-commercial use of the Article so long as Author receives credit as author and the journal in which the Article has been published is cited as the source of first publication of the Article”.

Et les données de la recherche ?

Jusque très récemment, les Creative Commons ne pouvaient pas être appliquées aux données. La version 4.0 modifie cela, et désormais on peut choisir d’attribuer une licence pour l’article et les sets de données liés, ou une licence pour l’article, une autre pour les données, à la guise de l’auteur.

Une institution publique est-elle libre de disposer des productions de ses chercheurs, au moins en intranet ?

Le code de la propriété intellectuelle prévoit que tout travail produit par un agent public dans l’exercice de ses fonctions appartient de fait à son institution, qui peut en user à sa guise. Sauf que le CPI comprend une clause d’exception pour les chercheurs, qui restent propriétaires de tous leurs droits sur leur production, même s’ils sont financés par l’État.

Angers à Strasbourg

Sur invitation de Paul-Antoine Hervieux, vice-président de l’Unistra, en charge du numérique et des partenariats avec les EPST et les collectivités, une délégation angevine est allée à Strasbourg le 21 octobre dernier. Nathalie Clot (directrice BU), Stéphane Amiard (VP numérique UA) et moi-même (chef de projet archive ouverte) avons présenté sous toutes les coutures le projet d’archive institutionnelle, à un public large et averti : environ 25 personnes, dont Alain Beretz, président de l’Unistra, Jean-Luc Bischoff, vice-président recherche de l’Université de Haute Alsace, plusieurs autres VP des deux universités, ainsi que les directeurs de services recherche, documentation, informatique, plusieurs chercheurs et des représentants de la Bibliothèque Nationale Universitaire.

Voici le support de cette présentation. Il se divise en trois parties :

  • une introduction sur la valorisation du capital immatériel, par Stéphane Amiard, diapos 1 à 4
  • une présentation de la stratégie angevine, par Nathalie Clot, diapos 5 à 18
  • une présentation axée gestion de projet, par Stéphanie Bouvier, diapos 19 à 27.

Point d’étape de rentrée

La nouvelle année universitaire démarre, l’occasion de faire le point sur les avancées des derniers mois.
Go board

Lettre de cadrage et gestion de projet

D’abord, suite aux différents votes en CS et CA, l’archive recherche est désormais un projet universitaire officiellement mandaté par Jean-Paul Saint-André, président de l’UA. Je suis chargée de ce projet, que cadre une lettre de mission stipulant les objectifs, les échéances, les moyens affectés, ainsi que les autorités de référence (à savoir : comité de direction de l’Université pour le suivi global, Florence Even, directrice générale adjointe chargée des fonctions support et recherche, et Stéphane Amiard, vice-président délégué au numérique).

Moyens humains

L’équipe s’est récemment étoffée :

  • Anne-Laure David, DDN, accompagne le volet technique du projet et assure l’assistance à maîtrise d’ouvrage
  • Baptiste Judic, développeur, DDN, travaille depuis juin 2013 sur la future archive
  • Emmanuel Lemoine, contractuel BU depuis le 1er septembre, a entamé la reprise des publications 2008-2012 des laboratoires pilotes.

Coopération avec les laboratoires

Tous les laboratoires ont été contactés pour une présentation. Les laboratoires rencontrés au 31 août 2013 sont les suivants :

  • Santé : GEIHP, GEROM, LNBT, CRT, BNMI, SOPAM
  • Végétal : BIAF, IRHS, SONAS
  • Matériaux : LPHIA, MOLTECH
  • MATH-STIC : LASQUO, LAREMA
  • LLSHS : CERIEC, Centre Jean Bodin, CERHIO, CRILA, 3L.AM, GRANEM

Parmi ces laboratoires, huit ont accepté d’être pilotes : MOLTECH, GRANEM, 3L.AM, LAREMA, SOPAM, SONAS, CERHIO, CRILA. Le travail est en cours avec eux.

Calendrier

L’objectif est d’ouvrir une version bêta de l’archive au plus tard en mars 2014 (conformément à la lettre de cadrage), et d’y proposer les publications des laboratoires pilotes, dont les chercheurs devront avoir été formés au dépôt d’ici là (pour le courant à partir de 2013).
Tous les laboratoires seront ensuite intégrés, par vagues successives, jusqu’en mars 2015.

[Crédit photo : Go board, hatdow, CC BY-NC-SA]

À propos du mandat UA

Les conseils scientifique et d’administration d’avril dernier ont été l’occasion pour Jean-Paul Saint-André de présenter et proposer au vote le contenu du mandat de notre future archive ouverte.

L’ensemble de la production scientifique des chercheurs devra être référencée depuis 2008, et le texte intégral des articles systématiquement joint depuis 2012.

Cette saisie du rétrospectif ne pèsera pas sur les chercheurs, puisque le gros de ce travail sera effectué par un bibliothécaire. Il restera aux chercheurs à vérifier que toute leur production est bien signalée, puis à ajouter les pdf. À chacun ensuite de signaler au fur et à mesure ses publications, pour le courant.

A voté ! Pour une archive ouverte institutionnelle à l’UA

D’abord le CS lundi 11 mars, puis le CA hier, jeudi 28 mars 2013, ont voté

  • la création d’une archive ouverte institutionnelle, pour diffuser et valoriser la recherche de l’Université d’Angers,
  • l’adoption d’un mandat de dépôt : les chercheurs seront appelés à signaler l’ensemble de leurs publications et à en déposer le texte intégral. Celui-ci sera diffusé en libre accès chaque fois que possible, ou si nécessaire en intranet.

Après dix mois de rencontres, réunions, échanges en tout genre, le travail peut désormais commencer, sur le plan technique et avec les laboratoires. Parmi ces derniers, des pilotes inaugureront le signalement de leurs publications dans l’AO locale, avant intégration progressive de l’ensemble des laboratoires UA.

L’Université d’Angers est l’un des premiers établissements d’enseignement supérieurs français à adopter un mandat de dépôt, peut-être la première parmi les universités. L’initiative est déjà saluée par certains, merci à eux.

Jean-Christophe Peyssard, Cléo, OpenEdition

Rémi Mathis, président de Wikimedia France

Olivier Ertzscheid, enseignant-chercheur, Université de Nantes

Bernard Rentier, Recteur de l’Université de Liège

Paul Thirion, directeur des bibliothèques de l’ULg