Lors du #bibcamp2014 dont j’ai parlé rapidement ici, j’ai saisi au vol une conversation tournant autour de la question du Service Public et de s’il fallait que les bibnums en fassent, ou pas. Assez vite, il s’est dit (comme d’habitude) qu’il était important que les bibnums participent au SP parce que c’était le seul moyen que ces personnels bibnums demeurent intégrés dans le quotidien des BUs.
Cette question SP/bibnum est récurrente (1) et si je mets quotidien en italiques, c’est tout simplement parce qu’il me semble que de fait, tout dépend de ce que l’on entend par là quand on dit ainsi que les bibnums doivent participer au quotidien des bibliothèques.
Si l’on déploie par ce terme une vision très physique, a-numérique, disons même pré-web, de la bibliothèque, alors oui, forcément, les bibnums doivent faire du SP puisque dans cette logique, la bibliothèque se cantonne à ses limites physiques, des murs, un toit, un bureau d’accueil, et des rayonnages — la bibliothèque à papa en somme.
Évidemment, aussitôt que l’on élargit la réflexion à ce que recouvre réellement de nos jours la bibliothèque, et que l’on inclut sa composante numérique dans la réflexion, l’affirmation selon laquelle il n’est de connexion au quotidien que via le SP physique, n’a strictement plus aucun sens : la bibliothèque de 2014 déborde très largement sa manifestation physique et il n’est nul besoin de faire du SP physique pour participer au fonctionnement de la boutique.
Si je prends mon modeste exemple (il me semble représentatif d’un banal bibnum), je ne fais plus de SP physique depuis 2 ou 3 ans (cf. note 1) mais je pense être parfaitement intégré au quotidien réel (i.e. actuel) de la #BUA :
- mon bureau ouvert sur les espaces physiques reçoit régulièrement des étudiant/e/s en panne de PC ou ayant des problèmes de clefs USB, wifi, virus, à qui l’on a indiqué que je pouvais peut-être les aider (leurs ami/e/s ou plus simplement, mes collègues en… SP) ;
- je réponds à nombre de demandes en ligne (formulaires contact de notre site web principalement mais aussi pages FB, compte Twitter ou plus traditionnellement, mails d’étudiant/e/s — l’adresse générique scd arrive dans ma BàL — sur toutes sortes de problèmes, la plupart numériques, mais pas tous, loin s’en faut) ;
- j’assure toute l’année, y compris les WE, jours fériés et vacances, la surveillance de nos outils et les réponses à des messages du type “je n’arrive pas à me connecter à ceci ou cela, quand êtes-vous ouverts, quel est le sens de la vie, etc etc” — et cela intègre l’aide à mes propres collègues de la BUA ;
En résumé, mon quotidien n’est certes pas celui de mes collègues “tradis” (j’emploie ce terme dans un sens non-péjoratif) mais il n’est nullement détaché de celui de la bibliothèque entendue dans toutes ses dimensions : mon quotidien se situe donc simplement ailleurs, dans une zone beaucoup moins visible (c’est sans doute le coeur du problème que ça pose encore), mais aussi et paradoxalement beaucoup plus “large” à la fois dans l’espace (souvent, la personne qui me sollicite n’est pas dans la bibliothèque et elle peut même se trouver de l’autre côté de la Terre, en stage par exemple) et dans le temps (mon quotidien ne s’arrête nullement avec la fermeture des portes des sites physiques le soir).
D’ailleurs, en revenant à la conversation que j’évoque ci-dessus, je pouvais parfaitement retourner tout ça comme une chaussette : dans mon quotidien à moi, il n’y a quasiment pas de bibs-tradis, et on pourrait s’étonner qu’ils (mes collègues) soient ainsi laissés loin du quotidien de la bibliothèque (considérée dans son ensemble) et cantonnés à leur monde unidimensionnel (je fais un peu de provoc mais vous avez compris le fond du message).
On le voit, considérer que le SP physique est le seul moyen d’être au contact des usagers et de leur quotidien comme de celui de la bibliothèque, c’est réduire de beaucoup la bibliothèque, c’est en fait l’amputer de toute sa partie “immatérielle” où pourtant, nos usagers (étudiants mais aussi personnels et collègues) passent de plus en plus de temps.
Je n’ai malheureusement pas eu le temps de m’insérer dans la discussion à l’origine de ce billet pour déballer mes arguments chaussettes. Heureusement, ledit débat peut reprendre ici, ailleurs, à un autre moment, dans un autre quotidien : les commentaires sont ouverts.
(1) y compris à la BUA où, pour l’instant, la moitié de l’équipe (laquelle compte 4 permanents) ne fait pas de SP physique, l’autre moitié étant limitée à 2h/semaine, à ma demande expresse. Oui, ça étonne mais ma réponse est prête : “personne ne participe à mon quotidien, je ne vois pas pourquoi je dois participer à celui de la bib physique : venez dans mon quotidien si vous voulez que je vienne dans le vôtre”.