Organisée à l’Université d’Angers, le 24 septembre 2021, la 17e édition de la Nuit européenne des chercheur·e·s avait pour thème le voyage. Sandra Contamina et Isabelle Trivisani-Moreau ont présenté lors d’une conférence leur programme de recherche sur « Les textes voyageurs » qui a donné lieu à l’élaboration d’un livre éponyme.
La Nuit européenne des chercheur·e·s a lieu dans 320 villes en Europe et 14 villes en France. Cette initiative tend à mettre la recherche à l’honneur en permettant aux scientifiques de tous ces lieux de faire voyager le grand public et leur faire découvrir leurs travaux. C’est dans cet objectif que Sandra Contamina et Isabelle Trivisani-Moreau, toutes deux maîtresses de conférences à l’Université d’Angers, ont animé une conférence lors de cet événement.
Des textes voyageurs pour s’évader ?
Les recherches des deux universitaires se fondent sur la période médiévale et moderne. La découverte du Nouveau Monde et la multiplication des échanges en Europe ont donné lieu à des textes voyageurs. Ils ont vocation à traduire, adapter les histoires des voyageurs. Ce sont eux qui écrivent mais le texte voyage lui aussi.
Comment les textes pérégrinent-ils à travers les époques ? Comment sont-ils modelés par ces voyages ?
Le voyage à l’époque médiévale et contemporaine se fonde sur l’expérience et la fortune, ce qui explique le choix de Sandra Contamina et Isabelle Trivisani-Moreau d’ouvrir la conférence sur des récits rédigés par de grands explorateurs tels que Colomb, Valdivia, Lazarillo. Autant d’exemples illustrant des parcours personnels marqués par l’aventure et l’esprit de voyage. Ces récits produits par les voyageurs se forgent dans un genre nouveau : le genre picaresque. Le narrateur est le protagoniste de son histoire. Ces héros dont le parcours est semé d’embûches remettent en cause l’ordre établi. À l’image des histoires de Gulliver qui sont riches en adversités et en rebondissements.
Isabelle Trivisani-Moreau montre que “des faits historiques deviennent allégoriques par le récit”. Dans Don Quichotte, l’univers mental de l’auteur prend forme dans un récit : de son obsession pour les livres de chevalerie, Hidalgo de la Manche finit par incarner son fantasme de héros errant.
“Les textes voyagent parce que les hommes voyagent”
Les attentes des lecteurs et les styles de récit changent selon les espaces, les époques et leurs contextes inhérents. “Les textes voyagent parce que les hommes voyagent”, souligne Sandra Contamina. Au Moyen-Âge, a lieu une révolution importante du support et de la diffusion des textes qui se traduit par une réelle intensification des éditions qui perdurera sur l’époque moderne. Le goût du voyage des lecteurs se révèle alors. Ces derniers s’approprient le texte. Peu à peu, le récit s’adapte et échappe à son auteur par les traductions et les adaptations faites. Les deux maîtresses de conférence sprennent l’exemple des Voyages de Gulliver en soulignant que sous la plume du traducteur français Desfontaines, tous propos scandaleux de l’édition originale anglaise avaient été épurés pour convenir au public visé.
#AccèsOuvert Les Textes voyageurs des périodes médiévale et moderne : Nouvelles Recherches sur l’Imaginaire, XLII https://t.co/lERkxAt749
— OpenEdition (@OpenEditionActu) October 15, 2021
La démarche scientifique de cette recherche s’inscrit dans un travail transdisciplinaire mêlant linguistes, cartographes, historiens et littéraires. Tout cela se fait à l’échelle transnational avec la coopération avec chercheur·e·s anglophones et hispanophones. Le résultat de ce long voyage intellectuel se matérialise en un ouvrage disponible aux PUR depuis le 8 octobre 2021 sur Openbooks, intitulé Les textes voyageurs des périodes médiévales et modernes, dont la rédaction a été dirigé par Sandra Contamina et Isabelle Trivisani-Moreau.
Roudy HUET , Valentin MAUDET, Élisa MOISAN-BEYLEIX, Tiago ROSA