Les frontières floues

Depuis maintenant 5 ans que je suis à Angers, mon boulot m’a amené à travailler de plus en plus étroitement avec mes collègues de la DDN (Direction du Développement Numérique, ex DSI). Le chemin a été long, il a fallu se connaître, apprendre à travailler ensemble, il a fallu surtout pour moi, je crois, devenir un minimum crédible à leurs yeux, ce qui n’est pas un mince affaire : ce sont des spécialistes d’un domaine pointu qui a ses propres règles de fonctionnement, en particulier au niveau de procédures rigoureuses ; je suis un bricoleux autodidacte généraliste oubliant souvent les procédures et fonctionnant quasiment tout le temps en mode fuzzy. Mais à force de patience (surtout de leur côté), je crois qu’on travaille plutôt pas mal ensemble maintenant.
Du coup, je commence à me demander maintenant pourquoi une section numérique existe dans la BUA (comme dans les autres BU ?), et s’il ne serait pas plus logique que les bibnums relèvent en partie (dans les organigrammes ou dans des missions temporaires précises, type task force) de la DDN/DSI ou plutôt d’un pôle transversal ou méta qui aurait fonction de s’occuper de la documentation et des accès à cette documentation, mais aussi de valorisation et de communication numérique, d’indexation des contenus, d’archivage, d’identité numérique, etc.
Cela permettrait de mélanger les approches métier et les visions, les habitudes, les lectures du monde. Cela permettrait également à chacun de sortir de ses logiques enfermantes et sclérosantes, de ses habitudes, des biais qui finissent par se mettre en place quand on fonctionne en circuit fermé (du genre croire que les usagers utilisent tous la recherche avancée ou connaissent par coeur le Dewey, suivez mon regard). Cela nous permettrait enfin de mettre à disposition de tous des compétences (les nôtres) utiles à tout projet numérique d’une université (la plus évidente des compétences étant celle liée aux questions d’indexation, mais c’est à mon avis loin d’être la seule qui peut nous rendre précieux à nos collègues DDN et à l’Université en général, sur les projets numériques).
C’est juste une idée, encore vague et qui je pense, devrait/peut être testée facilement sur le terrain. Vous en pensez quoi ?

MàJ 08 octobre 08:32

En fait je crois que la difficulté c’est d’avoir un pôle méta fluide sans tomber dans des groupes de travail ad hoc sur chaque projet, et dans lesquels tous les participants ne se sentent pas nécessairement super impliqués (et donc ne s’impliquent pas super).
Oui, voilà : la difficulté est de trouver une forme stable dans sa fluidité (la stabilité assure le bon fonctionnement des choses et l’avancée du travail de manière régulière, la fluidité permet d’agréger les bonnes personnes au bon moment et à ce moment-là seulement).

17 réflexions sur « Les frontières floues »

    • Warum, suicidaire ?
      Bon, je pense plus à un pôle méta et mouvant, à dire vrai. Parce que relever définitivement de la DSI/DDN ça veut dire passer intégralement au régime pizza et bon…

  1. A l’université de Nottingham, les BU sont intégrées à la DSI (enfin, un truc qui y ressemble). Par conséquent, le service bibliothèques est sous sa tutelle directe, et tout ce qui touche à la BibNum est directement géré par les Services Informatiques.
    Quand j’y ai fait mon stage, ça avait l’air de marcher très loin/bien en terme de communication inter-services.

    • Tu peux préciser le “ça avait l’air de marcher très loin/bien en terme de communication inter-services.” et surtout le “très loin” ?
      Merci de ton témoignage (tu peux enlever ta fausse moustache maintenant)

      • Oui, en fait j’étais dans le service sciences humaines (Hallward Library), entouré de subject librarians.
        Pour tout ce qui pouvait concerner les ressources numériques et la proposition de matériel / nouveaux outils, les bibliothécaires étaient dans une démarche très volontariste : envoi mail pour chaque nouvelle idée, puis demande de réalisation si possible.
        A part pour l’activité de catalogage (dans un service de réception centralisé), toute activité technique était initiée par des bibliothécaires, puis développée par les services non-directement bibliothécaires.

        A titre d’exemple, je faisais la promo des ebooks sur Gallica, mon Head librarian s’est dit que du coup l’utilisation de la tablette était obligatoire (je raccourcis), on a envoyé un mail au service informatique, on a mangé avec eux le midi et 4 jours plus tard on lançait le prêt de tablettes (achetées en boutique, et hop). C’est là que je me dis qu’administrativement, on a encore beaucoup à apprendre de leur part…

        • ok – je pensais dans mon billet à quelque chose qui dépasse la simple ‘commande’/proposition d’un service depuis les bibs vers la DDN – un truc plus fusionnel, en somme, avec les bibs plus ou moins dans la DDN ou un pôle méta.
          Dans ce que tu décris, ce qui m’interpelle, c’est la rapidité du parcours idée/décision/mise en place – ça a sans doute surtout à voir avec des modes de gouvernance et de gestion administrative, mais c’est très intéressant…
          Merci

  2. Cette idée de pôle autour du numérique, de ses usages, me trotte dans la tête depuis longtemps, et j’y ajouterai pour ma part tout ce qui tourne autour du e-learning. Seulement c’est très délicat parce que les BA (j’utilise bibliothèque académique et non bibliothèque universitaire) risquent là-dedans de perdre leur identité de fonction soutien, directement en interaction avec enseignement et recherche, en étant assimilée aux fonction support que sont les fonctions informatiques. Bref, il ne faut pas perdre le relationnel avec l’usager et pour ça il faut être vu par lui en termes d’organistion. Donc, d’accord pour l’idée mais vraiment en méta-structure très mobile.

    • Hum, je ne sais pas si les bibnums sont visibles de l’usager physique – de l’usager distant, oui, mais du physique, j’en doute. Et je doute encore plus que l’usager s’intéresse à nos structures et à leur organisation : je pense que l’usager s’intéresse au service qu’on lui rend, pas à la manière dont on lui rend.
      Cela dit, oui, je pense bien à une méta-structure très mobile et fluide.

  3. – Sur ta question “pourquoi une section numérique existe”, elle n’existe pas chez nous.
    – Sur ta question “ne serait pas plus logique que les bibnums relèvent en partie de la DDN/DSI”, je considère que c’est le cas chez nous dans la mesure où un collègue du CRI est détaché au SCD pour traiter les questions qui relève de ses qualifications pro (l’informatique pour faire court)
    – Sur ta proposition d’un “pôle transversal ou méta qui aurait fonction de s’occuper de la documentation et des accès à cette documentation, mais aussi de valorisation et de communication numérique, d’indexation des contenus, d’archivage, d’identité numérique, etc.” je ne sais pas s’il est nécessaire de formaliser administrativement des échanges/collaborations qui doivent se faire :
    – l’accès, c’est le boulot des informaticiens : on leur demande de nous faire le boulot
    – la valorisation, la communication, l’identité numérique, c’est la spécialité de la direction de la communication, on leur demande de nous aider
    – la sélection, l’acquisition de la doc, la formation à l’utilisation de ces ressources, c’est notre boulot, alors on le fait.

    Mon point de vue, c’est qu’il est utile aux bibliothécaires/documentalistes d’acquérir et d’entretenir une culture relative à l’informatique, au web, à la communication de manière à pouvoir comprendre et se faire comprendre des professionnels de ce domaine.
    Pour le reste, je ne suis pas informaticien ni un professionnel de la communication

    • Bonjour Antmeyl 🙂

      “Pour le reste, je ne suis pas informaticien ni un professionnel de la communication” >> justement, je plaide pour une formalisation de l’informel qui permette à l’informel de le rester – la formalisation institutionnelle aidant juste à ce que les compétences des non-spécialistes puissent s’exprimer quand la tendance est à rester entre spécialistes – grand danger.

      • Salut à toi aussi dbourrion,

        Peut être dans votre cas (ton équipe), le besoin de formalisation institutionnel se fait sentir. Dans le nôtre, je ne crois pas.

        C’est justement parce qu’on a besoin d’autres spécialistes (informaticiens, kommuniquants, mais aussi enseignants-chercheurs) qu’on ne restent pas pas entre spécialistes de la documentation.

        Les frontières ne sont pas floues, elles sont même plutôt claires. Simplement, les frontières ne sont pas conçues comme des barrières mais comme des lieux d’échange, de partage, d’hybridation, des lieux où les cultures (professionnelles) se côtoient et se mêlent (bon OK, ça sonne grandiloquent mais c quand même bien l’idée)

        Pour autant, si on a la chance d’avoir des collègues ayant une double spécialisation (documentation-informatique, documentation-enseignement, documentation-recherche, etc.), on en profite.

        • Ben justement, c’est ce pour quoi je plaidais : que les frontières-barrières deviennent des frontières-échanges – et que l’institutionnel éventuellement vienne aider à la manœuvre quand nécessaire en aidant aussi à passer à un niveau au-dessus (celui où la frontière se dilue).

          • Oui, mais est-il besoin de sortir institutionnellement la bibnum du pour cela, je ne le penses pas.
            Le coeur, c’est l’IST, et il me semble que sa diffusion relève plutôt des pro de la doc. L’informatique, comme la communication ou l’enseignement, sont des fonctions support.de cette mission de diffusion.
            Donc, si pôle transversal il doit y avoir (ou task force, cellule, ou comme tu voudra bien l’appeler), il doit à mon sens relever du SCD et pas du CRI/DDN/DSI de l’université.
            Et puis d’ailleurs, l’avenir de la gestion de l’accès n’est-il pas plus national que local (cf l’ISTEX)?

            • Euh pour moi, l’institution, c’est l’université, donc ce n’est pas en sortir.
              Pour la gestion nationale, vu le temps que ça risque de prendre, ça nous laisse de la marge pour réfléchir à d’autres trucs, et les faire 🙂
              Enfin, je me demande de plus en plus si mon coeur est l’IST…

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