Résidence automnale de mathémartistes à Angers

Du 30 octobre au 10 novembre, le laboratoire de mathématiques d’Angers a eu la joie d’accueillir deux mathématiciennes et artistes, Annalisa Panati (maîtresse de conférence à Toulon) et Coni Rojas-Molina (maîtresse de conférences à Paris-Cergy). Annalisa est écrivaine, Coni est illustratrice.

Dans les activités de recherche comme dans les activités artistiques, le temps joue un rôle essentiel. Sans un temps dédié, sans un certain havre de tranquillité, la réflexion et l’expérience sensible perdent de leur qualité et de leur profondeur. C’est pourquoi, ce fut un plaisir de soutenir leurs activités créatrices avec les fonds du projet régional de Clotilde Fermanian Kammerer, de l’Institut Universitaire de France et de la Maison des Mathématiques de l’Ouest. Une telle résidence d’artistes est, il faut le souligner, un événement singulier en France.

Entre les phases créatives des deux artistes, le programme de ces deux semaines fut dense :

  • Accueil de l’exposition “Emmy Noether, une mathématicienne d’exception” (amenée de l’Institut Henri Poincaré par les soins de Clotilde). Clotilde fait partie du comité scientifique de cette exposition, tandis que Coni en a été l’illustratrice. L’exposition est visible sur le campus du 6 novembre au 7 décembre 2023.
  • Coni a réalisé un petit fanzine reprenant les illustrations de l’exposition.
  • Répétitions de la lecture de la pièce de théâtre “Emmy s’en moque”, écrite par Annalisa. Le texte a été relu et travaillé (notamment sa traduction depuis l’italien). La lecture a eu lieu le mardi 7 novembre à 18h sur le Campus de Belle-Beille, à quelques pas de l’exposition sur Emmy Noether. Coni a également décrit son travail d’illustratrice à l’issue de la pièce.
  • Accueil de deux classes de terminale du lycée Joachim du Bellay (Angers) le 7 novembre. Que leurs enseignants, Anthony Page et Corinne Renault, soient remerciés de leur disponibilité ! Les élèves sont resté·e·s deux heures sur le campus (une heure pour découvrir l’exposition, une heure d’échange avec l’une des résidentes et moi-même). Ce fut l’occasion de discussions autour des études à l’université, des mathématiques, des parcours variés qui mènent aux mathématiques. Annalisa, Clotilde, Coni et moi avons ainsi évoqué nos différents parcours et notre vision de l’activité de mathématicien·ne. Cela a parfois suscité l’étonnement des élèves… et des enseignant·e·s et enseignant·e·s-chercheur·e·s présent·e·s. Cet étonnement a eu un je-ne-sais-quoi de réjouissant ; il a fait vivre les discussions. Cela souligne, je crois, l’importance d’exposer les jeunes générations, notamment les jeunes femmes, à une multitude de non-exemples, si on peut dire, mais aussi à des genres variés (dans tous les sens du terme).

Ce séjour a permis de commencer à concevoir le chapitrage d’un nouveau Document-BD et les grandes lignes d’un scénario. Annalisa a aussi commencé une phase de documentation en vue d’une pièce de théâtre sur une célèbre mathématicienne, tandis que Coni a pu mener un travail graphique sur une nouvelle BD et sa traduction française. Mais… je n’en dis pas plus !

Peu après le départ de nos deux artistes, l’exposition Emmy Noether a été officiellement inaugurée, conjointement à celle des œuvres de l’artiste plasticien, Yan Bernard.

Pour conclure ce billet, je ferai un dernier commentaire plus personnel. Mon lecteur ou ma lectrice anonyme n’aura pas manqué de remarquer la prépondérance du féminin dans ces activités artistiques. Ce n’est pas un hasard : c’est un choix. C’est le même choix qui a mené à l’organisation annuelle des Lectures Sophie Kowalevski depuis 2021 (en souvenir d’une brillante mathématicienne, écrivaine et voyageuse). Exister, c’est insister, comme on dit ! Garantir l’accès aux sciences pour tou·te·s, quel que soit le genre ou l’origine sociale, est incontournable si l’on souhaite vraiment un développement juste et efficace des sciences, mais aussi, tout simplement, une société plus humaine.