Rhodes vestige antique

Climat : des Grecs pas si anciens 

Au cours d’une conférence lors de la Nuit européenne des chercheur·e·s le 30 septembre 2022, au Centre Pierre Cointreau d’Angers, l’historien William Pillot a proposé un regard écologique et contemporain sur l’antiquité grecque.

« Nous avons un rapport au monde qui est à la fois très cartésien, très scientiste et très dominateur ». À 21 h, William Pillot a donné une conférence sur l’« imprévu », thème national de la 17e édition de la Nuit européenne des chercheur.e.s. En abordant ce concept, l’historien de l’Université d’Angers a invité le public à changer de regard sur le monde à travers les yeux des Grecs de l’Antiquité, plus proches de la nature. 

William Pillot s’appuie sur trois concepts clés pour jeter un pont entre le présent et l’antiquité grecque :

  • Un moyen d’action : le « kairos »

Le « kairos » peut se traduire par « l’imprévu » ou « le bon moment ». Pour les Grecs, constamment à la merci des imprévus, « des aléas impensés par l’esprit humain », le kairos permet d’en faire quelque chose de positif. Par exemple, la ville de Rhodes, après avoir été détruite par un séisme en 227 avant J.C., a été reconstruite en mieux. Cette notion « d’imprévu » peut permettre de mieux comprendre la crise climatique actuelle. Elle invite également à refuser tout déterminisme écologique, et à accepter de « vivre avec ce trouble ». 

  • S’ouvrir au monde : la « sophrosyne »

Il s’agit là d’un idéal philosophique de « sagesse », consistant à s’adapter à l’imprévu plutôt qu’à essayer de l’éviter. Aristote évoque, par exemple, la nécessité dès le plus jeune âge d’être en harmonie avec son environnement. William Pillot fait le parallèle avec la manière dont les sociétés contemporaines se sont éloignées de la nature. Selon lui, l’homme doit prendre conscience de son rapport au vivant pour en finir avec cette « fuite en avant écologique »

  • Préparer l’avenir : la « philia »

Signifiant « amitié », philia est le nom du dernier projet de William Pillot. Résolument tourné vers l’avenir, il inclut des jeunes de différents lycées afin de confronter leurs visions de l’environnement à celles des auteurs antiques. L’objectif est de trouver des solutions à leur éco-anxiété. Ce projet vise à « démomifier » l’histoire ancienne en rentrant en contact directement avec un public non-initié. L’historien évoque également la nécessité d’adapter la transmission du grec ancien aux nouvelles générations : « L’enseignement traditionnel du grec, par exemple, doit aussi être repensé ».

William Pillot chercheur
William Pillot a présenté lors de la Nuit des chercheur·e·s le manuel La Grèce antique. D’Hérodote à Aristote (510-336 avant notre ère) auquel il a collaboré.

Lors de sa conférence, le chercheur a démontré l’actualité des questions posées par les Grecs. Il utilise leur apport pour aborder le sujet du changement climatique, un de ses champs de recherche de prédilection étant l’histoire de l’écologie.

« Un refus du vivant »

L’historien confie son désir de repenser les rapports qu’entretiennent les individus à ce et ceux qui les entourent. Il fait remarquer à quel point le lieu dans lequel se déroule l’édition angevine de la Nuit des chercheur·e·s est coupé de la nature : « Au moment où je vous parle, on est dans un endroit où il n’y a pas de terre, on a éradiqué tout le vivant, tout est artificiel. Il y a, ici, quelque chose à questionner à propos de ce refus du vivant. »

Matéo DOLBEAU, Lucie GOUYON DE BONA, Antoine MARQUIS.

Pour retrouver William Pillot et avoir l’occasion d’échanger, il est possible d’assister aux séminaires du programme Hésiode.

William Pillot, parcours d’un chercheur

William Pillot est agrégé d’histoire depuis 2007. Il a soutenu une thèse de doctorat en 2013 intitulée “Ilion en Troade, de la colonisation éolienne au Haut Empire romain”. Il est, depuis 2015, maître de conférences en histoire et archéologie du monde grec antique à l’Université d’Angers. Chercheur au sein du laboratoire Temos (Temps, Mondes, Sociétés), il travaille sur le rapport qu’entretenaient les Grecs à autrui et à la nature.

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