La croissance revient ? Oui mais le gouvernement et Hollande n’y sont pour rien !

Enfin, la situation économique s’améliore ! L’Insee estime la croissance à 0,5% pour le premier trimestre et Pôle emploi annonce une forte baisse des demandeurs d’emploi de la catégorie A. Il n’en a pas fallu plus pour que Michel Sapin pavoise : « notre action porte ses fruits » a-t-il déclaré le 29 avril. Il faut avoir un certain aplomb et assez peu de considération pour les faits pour affirmer une telle chose. Car si croissance il y a (elle est incontestable), et si le chômage n’augmente plus, cela n’a pas grand-chose à voir avec l’action du gouvernement.

La préférence pour les entreprises

La priorité de François Hollande n’a jamais été la croissance et l’emploi. C’est en novembre 2012 que le rapport Gallois a fixé la ligne : celle de la « compétitivité » des entreprises et du rétablissement des marges. La politique menée alors, le CICE dès le 1er janvier 2013, puis le « Pacte de responsabilité » annoncé un an plus tard, a engagé le gouvernement dans la logique d’un prétendu  « socialisme de l’offre » qui s’est résumée à promettre des exonérations fiscales et sociales pour les entreprises d’un montant total de 41 milliards d’euros annuel en 2017 par rapport à 2012. C’est une somme considérable qui représente 2% du PIB, soit plus de la moitié du déficit public. Avec cette somme, l’État aurait pu créer directement environ 1 million d’emplois dans les hôpitaux, la police, l’enseignement, la recherche… Au lieu de ça, il a choisi de confier le coffre au patronat sans contrôler ce que ce dernier en ferait.

Trois ans et demi après sa mise en place quels sont les résultats de cette politique ? Les marges des entreprises françaises, durement affectées par la crise, se sont effectivement rétablies. Le taux de marge des sociétés non financières est passé de 29,4% fin 2013 à 31,5% au dernier trimestre 2015. La France est d’ailleurs le pays dans lequel la distribution de dividendes a le plus augmenté ces dernières années. Elle est ainsi devenue, d’après le dernier rapport de Henderson Global Investors, le plus gros payeur de dividendes en Europe continentale. En 2015, 42 milliards d’euros ont été distribués par les entreprises françaises, contre 30,5 milliards d’euros pour les entreprises allemandes. Sur le plan de la compétitivité en revanche, le succès est mitigé. Après la concurrence de l’Allemagne, les entreprises françaises ont été victimes de celle des pays d’Europe du sud. La crise et les « réformes » ont poussé les entreprises de ces pays à casser les prix, ceci par la pression sur les salaires. La part de la France dans les exportations européennes n’a donc pas progressé ces dernières années.

Baisser les salaires au nom de la compétitivité

La loi El-Khomri est, en quelque sorte, une réponse à cet échec. Jusqu’en 2015, le gouvernement s’était contenté d’exhorter les entreprises à pratiquer la modération salariale. Ainsi, en décembre 2014, devant Pierre Gattaz et un parterre de chefs d’entreprises étrangères, Michel Sapin déclarait : « c’est la responsabilité de chaque chef d’entreprise de faire en sorte que les salaires n’augmentent pas ».

En 2015, changement de stratégie : la modération salariale doit être suscitée par une grande réforme du code du travail. Le gouvernement prend exemple sur l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie… où  les réformes du marché du travail  ont contribué à limiter les revendications salariales. En permettant aux accords d’entreprise de s’imposer sur les accords de branche et le droit national, le gouvernement autorise les employeurs à conclure des accords qui modifient les contrats de travail dans un sens moins favorable aux salariés : baisser les majorations des heures supplémentaires, augmenter le temps de travail. Par ailleurs, en facilitant les licenciements et en contournant les syndicats, la « loi travail » entend affaiblir les revendications salariales.

La logique de cette réforme est donc dans la droite ligne des précédentes. Après avoir, grâce au « Pacte de responsabilité », mis le contribuable au service des marges des entreprises, le gouvernement fait cette fois porter sur les salariés le coût du rétablissement de la compétitivité. Tout cela pour forcer la France à s’insérer dans le cadre extrêmement concurrentiel d’une Union européenne où nos « partenaires » pratiquent un dumping social et fiscal d’une extrême violence.

Tiens ? Voilà la croissance !

Mais alors d’où vient cette croissance inespérée pour le gouvernement ? Certainement pas des effets de sa politique ! Et pour cause : l’essentiel de la croissance vient… de la hausse de la consommation des ménages, nous dit l’INSEE. Au premier trimestre, les dépenses de consommation des ménages ont ainsi augmenté de 1,2%, ce qui constitue la plus forte hausse depuis 2004. Or, cette hausse  est liée à des facteurs qui n’ont rien à voir avec l’action du gouvernement. Car les salaires et les revenus d’activité continuent d’augmenter un peu plus vite que l’inflation. Le pouvoir d’achat des français augmente légèrement. Comme par ailleurs les taux d’intérêt restent faibles, certains ménages renégocient à la baisse leurs crédits immobiliers ou en profitent pour financer un achat à crédit. Merci la BCE ! Merci les légères hausses salariales du secteur privé ! Merci la faiblesse des prix du pétrole !

En fin de compte, rien de tout cela n’est le fait du gouvernement. Pire… pendant ce temps la balance commerciale française continuait de se dégrader, les exportations françaises chutant de 0,2%. Manque de bol, la croissance ne vient pas de l’amélioration de l’offre et de la compétitivité des entreprises mais de la demande des ménages. Ce ne sont pas les profits des entreprises qui font la croissance, mais le pouvoir d’achat des consommateurs. Le gouvernement a tout faux. Malheureusement, il est content de lui.

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