Accueillir les lycéens à la BU : Opération révisions (épisode 2)

L'opération Bac 2015 à la BUA

L’opération Bac 2015 à la BUA

Nous voici donc en 2015, dans une période de flottement manifeste autour de la question des lycéens en BU. Plus de visites massives, plus de formations, plus de partenariats…. Et pourtant les lycéens sont là, et particulièrement à l’approche des révisions du bac. Parallèlement, la BU Saint Serge connaît déjà un contexte de saturation des places assises à certaines périodes de l’année, dont celle-ci. Nous souhaitions mieux gérer la présence lycéenne, déjà remarquée en 2014, qui n’était pas sans poser des problèmes de cohabitation avec nos usagers étudiants habituels, peu enthousiastes à la vue de ces nouveaux arrivants parfois peu acculturés aux règles d’usage des lieux, venant occuper parfois bruyamment « leur » bibliothèque et qu’ils considéraient comme peu légitimes. Il s’agissait donc de faire cohabiter sereinement nos actuels et nos futurs usagers dans les espaces mais aussi dans leurs usages.

Un groupe de travail est donc mis en place sur le 2e semestre 2014-2015, afin de faire une proposition pour le mois de juin 2015.  Le groupe travaille sur la mise en place d’un zonage des espaces, sur des outils de gestion et de régulation des dysfonctionnements, et sur un plan d’accompagnement des révisions pour les  lycéens. L’objectif est de travailler sur l’incitation plutôt que sur l’interdiction, d’encadrer en amont plutôt que de travailler sur la coercition, et d’acculturer nos probables futurs étudiants aux règles d’usage du lieu.

Le choix est rapidement fait de proposer une formule sur les 2 BU, espérant attirer  vers la BU Belle Beille une partie des effectifs présents à Saint Serge pour remédier à la saturation de l’espace, et permettant également aux lycéens de travailler sur un site proposant des collections pouvant les intéresser (histoire-géographie, sciences, philosophie, littérature…). Des contacts chez les tutelles nous laissent entrevoir la possibilité de financements… qui ne se concrétisent pas, nous partons donc sur une formule à moyens constants. Au terme de la période de réflexion, après élaboration de plusieurs scénarios,  le groupe de travail aboutit à la proposition suivante : une inscription minimale en ligne, permettant aux lycéens d’obtenir un « badge » leur offrant un accès aux PC et au wifi ; un zonage par type de public (lycéens vs étudiants) ;  l’achat de documentation spécifique pour les lycéens (annales) ; un accompagnement par des moniteurs étudiants sur quelques heures dans la journée, plutôt méthodologique et généraliste  ; un « pot d’accueil » qui avait pour objectif de faire se mêler la population étudiante et lycéenne (qui se connaît mieux cohabite mieux).

Une des clés de voûte du dispositif était la communication, à la fois interne et externe : nous avons été aidés par le service comm’ de l’université, à la fois sur la communication graphique (affiche, livrets…) et les contacts avec la presse. Nous avons informé de manière détaillée nos collègues, sur ce qu’ils avaient à faire concrètement à l’accueil en terme de transmission préalable des règles d’usage et de régulation, par le biais de réunions d’équipe et de procédures écrites ; pour les lycéens, nous avions mis en place une communication à 2 niveaux : auprès des proviseurs, pour qu’ils transmettent l’information dans leurs établissements ; auprès des parents, via des articles dans la presse locale.

Au final, côté lycéens, l’opération a plutôt bien fonctionné : ils sont venus en nombre et ont semblé apprécier les espaces et l’accueil. Sur le site, 315 lycéens avaient fait les démarches d’inscription pour obtenir les accès, et nos comptages, bien qu’à la fiabilité aléatoire en raison de la difficulté à distinguer lycéens et étudiants, se montaient à une centaine de lycéens par jour environ à la BU St Serge, avec des pointes jusqu’à 340 personnes à l’approche des épreuves écrites.  Côté étudiants, la réception de l’opération a reçu un accueil plus frais * doux euphémisme *. Nous avions prévu une réunion de bilan après l’opération. La formule, bien qu’appréciée par nos futurs utilisateurs, laissait néanmoins apparaître plusieurs points d’achoppement, sur lesquels nous avons essayé de travailler dans l’édition 2016 :

– la fréquentation de la BU Belle Beille par les lycéens, du fait de son implantation géographique excentrée, a été bien moindre qu’à Saint Serge. Il n’y a pas eu de report de la fréquentation de Saint Serge sur Belle Beille, en dépit de nos efforts, sans doute en raison de la mauvaise desserte du campus par les transports en commun. Néanmoins, les lycéens inscrits au lycée tout proche ont utilisé les espaces de Belle Beille, ce qui nous a  incité à reconduire l’expérience sur les 2 BU.

– une difficulté à identifier les lycéens par rapport aux étudiants, qui rendait difficile le zonage par public : rien ne ressemble plus à un étudiant de L1 ou L2 qu’un lycéen, et inversement. Le groupe pensait repartir en 2016 sur un zonage par public, sur des niveaux différents de la première édition, mais qui avec le recul, a semblé difficile à reconduire, du fait notamment du fort mécontentement des étudiants qui s’était exprimé via Facebook et de nombreux courriels à chaud en 2015, et en écho à froid dans les commentaires de l’enquête horaires menée en 2016, où nous avions eu beaucoup de remarques sur la présence lycéenne dans la BU et des contestations sur la légitimité de cette présence.

Quelques commentaires (anonymisés) sur Facebook lors de l'opération Bac 2015

Quelques commentaires (anonymisés) sur Facebook lors de l’opération Bac 2015

Ci-contre, un petit aperçu des réactions à l’opération sur Facebook. Nos réponses et la suite de l’échange à lire ici. Le calendrier des révisions du bac se chevauchant avec celui des étudiants en santé, conjugué à notre difficulté à faire respecter le zonage par public et les règles d’usage dans la BU (bruit, nourriture notamment), n’a pas joué en notre faveur.

Nous avons donc choisi de tester une autre solution en 2016, le zonage par usage, (zone silence, zone calme, zone de travail de groupe) pour faciliter la régulation. A Belle Beille, le zonage par usages étant déjà la règle toute l’année, nous n’avons pas eu à modifier les habitudes.

– la communication a été simplifiée pour être plus lisible: le livret d’accueil trop fourni, a été réduit à un A5 où figurent les règles d’usage essentielles, et où sont inscrits les codes d’accès à internet (ce qui oblige les lycéens à le regarder et à le conserver), la  signalétique dans les espaces a été retravaillée pour être plus visible (grandes affiches à l’entrée, stickers rappelant les usages de chaque zone dans toute la BU). Nous avons construit un argumentaire sur la légitimité d’une présence lycéenne encadrée pour répondre aux objections des étudiants mécontents.

– la délivrance des codes d’accès internet et wifi  avait été très appréciée par les lycéens, mais côté back office, la procédure d’inscription était complexe. Le zonage par usage rendant inutile l’identification de ce type de public, nous avons choisi de la simplifier : en 2016, le.la lycéen.ne qui voulait des codes d’accès devait simplement se présenter à l’accueil et se les voyait remettre, accompagné d’un petit rappel des règles d’usage en vigueur, ceci à Saint Serge comme à Belle Beille.

– les dates retenues en 2015 sur la demande des établissements étaient trop tardives (à partir du 10 juin) pour éviter que les lycéens désertent leurs lycées trop tôt ; cela ne les a malgré tout pas empêchés d’être présents à la BU dès le milieu du mois de mai, alors que le dispositif n’avait pas encore été mis en place : nous avons donc choisi de commencer plus tôt l’année suivante.

– l’accompagnement proposé sur quelques heures par jour par les moniteurs formation a également été revu. Les monitrices nous avaient confirmé lors de cette réunion le fait que l’aide qu’elles avaient pu apporter était minime, et que les les lycéens auraient préféré une aide disciplinaire. Nous aurions pu reconduire une aide plutôt disciplinaire l’année suivante dans l’hypothèse d’un soutien financier des tutelles (car celle-ci nécessite plus de moniteurs qu’une aide méthodologique), ce qui n’a pas été le cas. Nous avons donc abandonné pour le moment cette offre.

– la documentation mise à disposition des lycéens (annales) avait été peu utilisée lors de la première édition. Les annales papier 2015 avaient été conservées en magasin, mais du fait du peu d’utilisation, il n’avait pas été prévu d’en racheter d’autres en 2016. Quant aux annales sur liseuses, il n’y avait pas eu plus d’une ou 2 consultations, nous n’avons donc pas prévu d’achats sous format numérique.

Nous n’avons pas reconduit le groupe de travail formé en 2015, qui n’avait pas vocation à être pérennisé, mais nous avons choisi de nous appuyer sur les éléments qui avaient fonctionné et sur les conclusions du groupe, pour mettre en place l’année suivante un dispositif léger et rapide à déployer. L’objectif était de limiter l’investissement des équipes sur la régulation et la gestion de la cohabitation, coûteuse en temps et en énergie, et qui mobilise déjà beaucoup le personnel de la BU Saint Serge dans l’année avec la saturation des places assises. Nous nous sommes donc concentrés sur les services les plus utilisés (espaces et wifi). Nous avions formulé de nombreuses propositions en 2015, qui se sont confrontées à “l’épreuve du réel” : pour mieux répondre aux besoins de ces usagers, il n’était pas forcément utile de consacrer de l’énergie et du temps à certains services sous-utilisés.

Voilà comment nous avons progressivement allégé notre offre en direction des lycéens en observant leurs usages : nous les considérons finalement comme des étudiants « comme les autres », sans faire de distinction, ce qui leur permet d’intégrer les règles du lieu sans trop de heurts, par un accueil bienveillant. Ils sont bienvenus, mais responsabilisés, ce qui répond sans doute à leur désir d’autonomie. Le zonage par usage, valable pour tous, nous permet une régulation plus efficace dans les périodes de révision : une partie des stickers apposés dans la BU ont été conservés toute l’année (zone calme, zone silence et règles en vigueur), et nous remettrons en place en mai-juin 2017 une campagne d’affichage plus massive et plus visible pour les rappeler aux nouveaux arrivants.
Reste maintenant, dans l’optique de mieux connaître notre futur public, à travailler sur des enquêtes et des observations in situ plus poussées sur leurs besoins et leurs usages, afin de pouvoir affiner et réajuster la formule.